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SECTION II LA SITUATION GENERALE SUR TERRE - Partie 6

 

Il a fallu une direction déterminée pour conduire l'homme du stade de l'homme primitif au niveau d'évolution où un Platon, un Shakespeare, un Léonard de Vinci, un Beethoven purent apparaître. Un certain pouvoir a suscité chez l'homme la faculté de formuler des idées, de produire des systèmes de théologie, de science et de gouvernement. Quelque motif intérieur puissant a donné à l'homme son aptitude à créer de la beauté, à découvrir les secrets de la nature. Une certaine compréhension de la responsabilité divine est à l'arrière- plan de la philanthropie, des systèmes d'éducation et des mouvements de secours social du monde entier. Le progrès de l'esprit humain a consisté en un développement irrésistible, en une appréciation croissante de la réalité, de la beauté et de la sagesse. L'instinct s'est développé pour devenir l'intellect ; l'intellect commence à se transformer en intuition. La signification de Dieu, la perception consciente du pouvoir divin de l'homme, la faculté croissante de comprendre et de partager le mode de pensée des autres, indiquent progrès et développement.

Cette image de la beauté de l'esprit humain doit être placée à côté de l'image précédente de l'égoïsme et de la cruauté des hommes. Les deux images sont vraies, mais seule celle de la beauté est éternelle ; l'autre n'est que transitoire. L'homme est un composé d'expressions élevées et basses ; derrière toutes les guerres et les difficultés qui accompagnent le progrès humain au cours des âges, on trouve ce facteur majeur – la lutte persistante et ancienne de l'aspiration spirituelle de l'homme et de ses désirs matériels. Cet état de choses est aujourd'hui centré sur le conflit qui fait rage entre les puissances totalitaires et les nations qui luttent pour les droits de l'esprit humain et pour la liberté de l'humanité.

Mon emploi du mot spirituel n'a rien à voir avec l'emploi de ce mot par les religions orthodoxes, si ce n'est que l'expression religieuse fait partie de la spiritualité générale de l'humanité. Est spirituel tout [187] ce qui tend à la compréhension, à la bonté, à ce qui engendre la beauté et peut conduire l'homme à une expression plus complète de ses potentialités divines. Est mauvais tout ce qui entraîne l'homme plus profondément dans le matérialisme, qui néglige les valeurs supérieures de la vie, qui soutient l'égoïsme, qui dresse des barrières à l'établissement de justes relations humaines et nourrit l'esprit de séparativité, de peur, de vengeance.

Sur la base de ces distinctions, il apparaît sûrement que Dieu est du côté des nations alliées, car on ne peut pas supposer que le Christ soit du côté d'Hitler et du règne de l'agression cruelle. La Hiérarchie spirituelle de la planète jette tout le poids de sa force contre les puissances de l'Axe, dans la mesure, néanmoins, où les hommes de mentalité spirituelle peuvent collaborer, car nulle coercition ne peut être exercée sur le libre arbitre de l'homme. Nul n'a peur des nations alliées ; la situation actuelle n'a pas été précipitée par les Alliés ; leurs méthodes ne sont pas celles de la propagande mensongère ; ils ne terrorisent pas les faibles et les sans défense. Tout ceci est prouvé par les faits ; c'est cette reconnaissance qui est à la base de l'aide constante des États-Unis. Le mode de vie et les objectifs spirituels des démocraties sont reconnus par tous ; ce sont ces derniers qui sont menacés par les concepts totalitaires sur la vie. Par le moyen des démocraties l'humanité parle.

L'ordre mondial de l'Axe

L'ordre totalitaire doit disparaître car il est contraire à la vision spirituelle. L'ordre mondial, tel que l'envisage Hitler, est basé sur l'assujettissement des faibles et l'autorité d'une super-Allemagne. La vie des petites nations ne serait permise que dans la mesure où elle servirait les besoins de l'Allemagne. On permet l'existence des puissances secondaires de l'Axe uniquement parce qu'elles favorisent les buts de l'Allemagne : l'Italie, pour donner à l'Allemagne un champ d'action en Méditerranée ; le Japon, pour prendre en main le problème asiatique, qui est trop lourd pour l'Allemagne seule. C'est un ordre où il est prévu que tous les meilleurs produits de l'agriculture et de l'industrie aillent en Allemagne et le résidu, dont elle n'a que faire, [188] aux petites nations. C'est un ordre où les procédés d'éducation seront entre les mains de la super-race dominante. Les différentes parties de la connaissance seront subordonnées à la glorification de l'Allemagne. L'Allemagne y sera représentée comme la semence de toute la gloire du monde et comme l'impitoyable sauveur de l'humanité. On mettra l'accent sur les beautés de la guerre, de la lutte, de la force physique ; ces prétendus admirables objectifs de l'esprit humain seront développés, afin de produire une race d'hommes chez qui les beautés efféminées de la bonté aimante et de la sage estime pour les autres n'auront pas leur place.

Je voudrais attirer votre attention sur l'enseignement que l'on donne actuellement à la jeunesse allemande. La force c'est le droit. Les Allemands appartiennent à une race supérieure, et toutes les autres races sont inférieures. Seule une aristocratie choisie doit avoir le privilège de l'éducation et du gouvernement. La masse n'est rien de plus que du bétail, existant uniquement pour être les esclaves de la race supérieure. La guerre est aux hommes ce que la mise au monde des enfants est aux femmes. La guerre est un processus naturel et éternellement juste. Toutes les sources de ravitaillement doivent être contrôlées par l'Allemagne ; en conséquence même les nations actuellement neutres doivent être placées dans la sphère d'influence germanique. Les puissances totalitaires domineront le système économique du monde et auront la haute main sur toutes les importations et exportations. Le niveau de vie sera abaissé dans les deux hémisphères ; tout sera rapporté au bien de l'Allemagne et l'on ne prendra en considération aucune autre nation. L'enseignement chrétien et la morale chrétienne doivent nécessairement être éliminés, car l'Allemagne considère le christianisme et son divin Fondateur comme efféminé et faible, comme mettant l'accent sur les qualités les plus douces de la nature humaine et responsable de la décadence des nations, l'Allemagne exceptée. Le christianisme doit aussi être rejeté car il est basé sur des sources juives ; la loi du Christ doit disparaître car seule la loi de la force est juste.

Dans l'ordre mondial des puissances de l'Axe l'individu n'a aucun droit ; il n'a aucune liberté, si ce n'est de servir l'État ; il n'y aura pas de liberté de pensée ou de conscience, toutes les décisions étant prises par l'état et le citoyen privé n'ayant droit à aucune opinion. Les [189] hommes seront désignés comme des esclaves pour le service de l'État.

Telle est l'image de l'ordre que les puissances de l'Axe se préparent à imposer au monde ; leurs propres paroles en témoignent. C'est seulement en pénétrant la vraie nature de cette crise, par le courage et la détermination de voir les choses en face, que l'on parviendra à vaincre Hitler. Ce courage doit être basé sur la reconnaissance des valeurs spirituelles impliquées, sur la croyance en Dieu et sur le bon sens bien déterminé à établir la sécurité de justes relations humaines et la liberté.

Il est important qu'immédiatement les gens regardent les faits en face. Il faut qu'ils comprennent la nature de l'ordre mondial qu'Hitler se prépare à imposer et ce que sera l'avenir de l'humanité si les puissances de l'Axe triomphent. Il est essentiel que les enfants soient sauvés de ce mal qui plane au- dessus d'eux, et de l'éducation fausse à laquelle ils seront soumis, si les puissances totalitaires tiennent l'Europe entre leurs griffes. La culture intensive donnée à la jeunesse de l'Allemagne pendant les vingt dernières années a prouvé les effets des attitudes mentales environnantes. Ces jeunes qui font avancer leurs chars, voler leurs avions sur les pays européens, qui font la guerre aux femmes et aux enfants sont le résultat d'un système d'éducation ; ils sont donc les victimes d'un processus malfaisant. Les enfants de l'Allemagne doivent être sauvés de l'avenir projeté par Hitler, de même que les enfants des autres pays ; les femmes allemandes doivent être libérées de la peur, comme les femmes des autres pays ; la population de l'Allemagne doit aussi être délivrée de l'autorité malfaisante d'Hitler. Ceci est reconnu par les nations alliées. Ne vous y trompez pas. Les Allemands sont aussi chers au cœur de l'humanité, de Dieu, du Christ et de toutes les personnes pensant juste que tout autre peuple. Les Allemands doivent être délivrés de l'ordre mondial d'Hitler autant que les Polonais, les Juifs, les Tchèques ou toute autre nation captive. En effectuant cette libération, les nations alliées et les puissances neutres doivent conserver un esprit de bonne volonté, même lorsqu'elles emploient la force, ce qui est le seul moyen de conquête que les puissances totalitaires comprennent. [190]

Conditions d'un nouvel ordre mondial

En opposition avec l'ordre mondial totalitaire, quels plans mondiaux le reste du monde devrait-il faire ?

Les projets utopiques, les formes idéalistes de gouvernement, les procédés de vie culturelle ont toujours été un jeu de l'esprit humain depuis des siècles. Mais ces utopies dépassent tellement les possibilités que les présenter semble sans objet. La plupart sont entièrement impraticables.

On peut, néanmoins, dégager certaines possibilités immédiates et certains objectifs accessibles, en supposant, de la part de l'humanité, une volonté-de- bien précise et de la patience.

Certaines prémisses spirituelles importantes doivent servir de base à toute tentative de formulation d'un nouvel ordre mondial.

Permettez-moi d'en citer quelques-unes :

1. L'ordre mondial nouveau doit répondre au besoin immédiat, et non à une tentative de satisfaire quelque vision idéaliste et lointaine.

2. L'ordre mondial nouveau doit être adapté à un monde qui est passé par une crise de destruction et à une humanité fortement secouée par cette expérience.

3. L'ordre mondial nouveau doit poser les fondements d'un futur ordre mondial, qui ne sera possible qu'après un temps de récupération et de reconstruction.

4. L'ordre mondial nouveau sera basé sur la reconnaissance que tous les hommes sont égaux par l'origine et le but, mais tous à des stades différents d'évolution ; que l'intégrité personnelle, l'intelligence, la vision, l'expérience et une bonne volonté marquée, devraient désigner les gouvernants. La domination du prolétariat sur l'aristocratie et la bourgeoisie, comme en Russie, où la domination d'une aristocratie retranchée sur le prolétariat et les classes moyennes, comme cela a été le cas en Grande-Bretagne jusqu'à une date récente, doivent disparaître. L'autorité du travail sur le capital ou du capital sur le travail doit disparaître aussi. [191]

5. Dans l'ordre mondial nouveau, le corps gouvernant de toute nation devrait être composé de ceux qui travaillent pour le plus grand bien du plus grand nombre et qui, en même temps, offrent leur chance à tous, en veillant à ce que la liberté individuelle soit respectée. Aujourd'hui des hommes doués de vision parviennent à la reconnaissance, rendant possible un juste choix des gouvernants, ce qui était impossible jusqu'à notre siècle.

6. L'ordre mondial nouveau sera fondé sur un sens actif de la responsabilité. La règle sera "tous pour un, et un pour tous". Cette attitude devra être développée entre les nations. Elle n'est pas encore présente.

7. L'ordre mondial nouveau n'imposera pas aux nations un type uniforme de gouvernement, une religion de synthèse ou un système de standardisation. Les droits souverains de chaque nation seront reconnus, ainsi que son génie particulier ; les tendances individuelles, les qualités raciales pourront s'exprimer pleinement. Dans un seul domaine, il faudrait tenter de réaliser l'unité, dans le domaine de l'éducation.

8. L'ordre mondial nouveau reconnaîtra que les produits du monde, les ressources naturelles de la planète et ses richesses n'appartiennent à aucune nation en particulier, mais doivent être partagés par tous. Il n'y aura pas de nations dans la catégorie des "possédantes" et d'autres dans la catégorie opposée. Une distribution équitable et convenablement organisée du blé, du pétrole et des richesses minérales du monde entier se développera, basée sur les besoins de chaque nation, sur ses ressources intérieures et sur les besoins de son peuple. Tout ceci sera exécuté en relation avec le tout.

9. Dans la période préparatoire à l'ordre mondial nouveau il y aura un désarmement régulier et contrôlé. Ce ne sera pas facultatif. Il ne sera permis à aucune nation de produire et d'organiser des équipements à des fins de destruction ou d'enfreindre à la sécurité de toute autre nation. L'une des premières tâches d'une future conférence de paix sera de régler cette question et de veiller au désarmement progressif des nations. [192]

Voici les prémisses simples et générales sur lesquelles l'ordre mondial nouveau doit commencer à travailler. Ces stades préliminaires doivent être maintenus fluides et expérimentaux ; la vision de ce qui est possible ne doit jamais être perdue et les fondations doivent demeurer inviolées, mais les processus intermédiaires et les expérimentations doivent être menés par des hommes qui, ayant à cœur l'intérêt supérieur de tous, peuvent changer le détail de l'organisation, tout en sauvegardant la vie de l'organisme.

Les justes relations humaines

L'objectif peut se résumer ainsi : le nouvel ordre mondial facilitera l'établissement de justes relations humaines, basées sur la justice, la reconnaissance des droits hérités, des chances égales pour tous – quelles que soient la race, la couleur et la croyance – sur la suppression du crime et de l'égoïsme par une éducation adéquate, sur la reconnaissance de pouvoirs divins chez l'homme, ainsi que sur une reconnaissance d'une Intelligence divine dirigeante, en Laquelle l'homme a la vie, le mouvement et l'être.

Les difficultés, confrontant les nations quand la guerre sera terminée, peuvent sembler insurmontables, mais, avec de la bonne volonté, de la patience et de la vision, elles peuvent être résolues. En supposant que l'humanité n'aura de cesse que les nations agressives soient vaincues, il sera nécessaire que les démocraties victorieuses soient généreuses, clémentes, compréhensives et attentives à la voix du peuple dans son ensemble. C'est cette voix (habituellement saine dans ses jugements) qui doit être évoquée, reconnue et écoutée, et non la voix des représentants séparatifs de quelque idéologie, forme de gouvernement, religion ou parti. L'objectif de ceux à qui on confiera la tâche de redresser le monde. ne sera pas d'imposer la démocratie au monde entier, ni le christianisme à un monde de religions diversifiées. Ce sera sûrement d'encourager les meilleurs éléments de tout gouvernement national, auquel le peuple souscrira ou qu'il approuvera intelligemment. Chaque nation devrait reconnaître que sa propre [193] forme de gouvernement peut lui convenir, mais ne pas convenir du tout à une autre nation. On devrait enseigner que la fonction de chaque nation est de parfaire sa vie nationale, son rythme, son mécanisme, afin d'être un partenaire efficace de toutes les autres nations.

Il est également essentiel que l'ordre mondial nouveau développe chez l'humanité un sens de divinité et de relation avec Dieu et cependant ne mette pas l'accent sur les théologies raciales et les croyances séparatives. Les facteurs essentiels des croyances religieuses et politiques doivent être enseignés ; il faut qu'une nouvelle simplicité de vie soit inculquée. Aujourd'hui ceci se perd parce que l'accent est mis sur les possessions matérielles, les choses et l'argent. Il faudra regarder en face la question de l'argent ; le problème de la distribution de la richesse, naturelle ou humaine, devra être traité avec soin, et il faudra trouver un compromis entre les nations qui possèdent des ressources illimitées et celles qui en ont peu ou pas. Le problème des différentes formes de gouvernement national doit être regardé en face avec courage et pénétration. La restauration psychologique, spirituelle et physique de l'humanité doit constituer l'une des responsabilités primordiales. L'impression de sécurité doit être placée sur une base ferme, c'est-à-dire une base de relations justes et non celle de la force. Les hommes doivent se sentir en sécurité, car ils cherchent à développer une bonne volonté internationale, ils peuvent se faire confiance les uns aux autres et ne dépendent donc pas de la force de leur armée ou de leur flotte.

La reconnaissance de la Hiérarchie spirituelle, qui existe dans le Nouveau Groupe des Serviteurs du Monde, doit s'accroître régulièrement sous une forme ou une autre. Ceci interviendra lorsque les hommes d'état et gouvernants des différentes nations et corps de gouvernements – politiques ou religieux – seront doués de vision, que leurs motifs seront spirituels et leur inspiration altruiste.

Le futur ordre mondial sera une expression pratique de la fusion du mode de vie intérieur et spirituel et du mode d'action extérieur, civilisé et culturel ; c'est une possibilité réelle, car l'humanité, dans ses couches supérieures, a déjà acquis la faculté de vivre simultanément dans le monde physique et dans le monde intellectuel. Beaucoup de gens, aujourd'hui, vivent aussi dans le monde spirituel. Demain, il y en aura bien davantage. [194]

III. Quelques-uns des problèmes qui se posent

Le nouvel ordre mondial devra faire face à de nombreux problèmes. Ces problèmes ne seront pas résolus en imposant une solution par la force, comme dans l'ordre mondial de l'Axe. Ils seront résolus par de bonnes méthodes d'éducation et par la compréhension des objectifs du véritable ordre mondial. En gros, ils se divisent en quatre catégories : le problème racial, le problème économique, le problème de gouvernement et le problème religieux.

Le problème racial

Il n'existe aucune manière de résoudre le problème racial par les lois, la ségrégation, ou par une tentative de former des blocs nationaux, comme dans le cas de l'Allemagne d'aujourd'hui, qui proclame que les Allemands sont des surhommes. De telles tentatives ne servent qu'à dresser des barrières insurmontables. À part de très rares exceptions, il n'y a pas de races pures. L'Allemagne en particulier, étant située au carrefour de l'Europe, est nettement la fusion de plusieurs souches. Les vagues d'émigration, les armées conquérantes au cours des siècles, les voyages du monde moderne, ont mêlé et fusionné inextricablement toutes les races. On peut donc considérer que toute tentative pour isoler une race ou imposer une prétendue "pureté raciale" est vouée à l'échec. La seule solution de ce problème consiste à reconnaître que tous les hommes sont frères ; qu'un seul sang coule dans les veines de l'humanité ; que nous sommes tous les enfants du même Père et que si nous ne reconnaissons pas ce fait, c'est simplement une indication de notre stupidité en tant qu'homme. L'arrière-plan historique, les conditions climatiques et les mariages mixtes généralisés ont fait des différentes races ce qu'elles sont aujourd'hui. Essentiellement, néanmoins, l'humanité est une : héritière des âges, produit de nombreuses fusions, modelée par les circonstances, enrichie par le processus de développement évolutionnaire. Cette unité de base doit maintenant être reconnue.

Le problème racial majeur a été, depuis des siècles, celui des Juifs, que l'Allemagne a porté à un point culminant. Ce problème peut aussi [195] être résolu, si on le reconnaît pour ce qu'il est, si les Juifs font eux-mêmes un effort pour le résoudre et coopèrent aux efforts mondiaux pour régler cette question. Ils ne l'ont pas encore fait, car le Juif moyen est solitaire et instable, capable de peu de chose pour se concilier le monde. Instinctivement et intellectuellement, le Juif est séparatif ; intuitivement il a la vision mais, par ailleurs, aucun sens de fusion avec les autres peuples.

Il n'y a aucun mode scientifique jusqu'ici connu de solution des problèmes raciaux. C'est finalement une question de pensée juste, de conduite correcte et de simple bonté. La question ne sera pas résolue par des mariages entre les races, ni par l'isolement de groupes occupant des territoires particuliers, ni par aucune idée de supériorité ou d'infériorité connue par l'homme. De justes relations humaines découleront d'une reconnaissance mutuelle des erreurs, du regret de l'action mauvaise du passé et, si possible, de la restitution. Elles apparaîtront quand on pourra enseigner aux nations à apprécier les qualités des autres nations et à comprendre le rôle qu'elles jouent dans le tableau d'ensemble. Elles se développeront quand sera détruit le sens de la supériorité raciale ; quand les différences raciales et les querelles raciales seront reléguées dans un passé fâcheux, et que seul un avenir de coopération et de compréhension sera activement promu. Elles feront sentir leur présence quand le mode de vie comportant de justes relations (recherchées par toutes les personnes éclairées de toute race) deviendra l'attitude habituelle des masses, quand on considérera qu'il est contraire aux meilleurs intérêts de toute nation de répandre des idées tendant à dresser des barrières raciales ou nationales, à susciter des haines et à entretenir des différences et des séparations. Ce temps- là viendra sûrement. L'humanité maîtrisera le problème des relations humaines et des attitudes justes.

Il est inévitable qu'il existe des différences raciales, des querelles nationales et des distinctions de caste, mais il est également impératif qu'elles disparaissent. Le monde est un seul monde. L'humanité est une seule unité dans le processus de l'évolution. Les différences sont le fait de l'homme et engendrent la haine et la séparation. Quand on enseignera aux enfants des diverses races, dès leurs premières années, qu'il n'y a aucune différence, que tous les hommes sont frères et que les distinctions apparentes sont essentiellement superficielles, les [196] générations futures aborderont alors le problème des interrelations mondiales, sans le handicap des préjugés, de l'orgueil racial ou des ressentiments historiques inculqués. Par une bonne éducation on peut enseigner aux petits enfants des attitudes justes ; ils seront réceptifs, car l'enfant ne voit ni ne reconnaît aucune différence ; la vérité de la promesse biblique selon laquelle "un petit enfant les conduira" se révélera être scientifiquement vraie. Le nouvel ordre mondial instaurera ce processus éducatif.

Le problème économique

Ce problème est fondamentalement bien moins difficile à résoudre. Un solide bon sens peut le faire. Il y a des ressources suffisantes pour entretenir la vie humaine que la science peut accroître et développer. La richesse minérale, le pétrole, le produit des champs, la contribution du règne animal, la richesse de la mer, les fruits et les fleurs s'offrent tous à l'humanité. L'homme détient toutes ces ressources, elles appartiennent à tous et ne sont la propriété d'aucun groupe, nation ou race. Seul l'égoïsme humain est responsable (en ces jours de transports rapides) de ce que des milliers de gens meurent de faim, alors que la nourriture pourrit ou est détruite. Seules des combinaisons intéressées et des injustices financières dues à l'homme font que les ressources de la planète ne sont pas universellement disponibles, par quelque sage système de distribution. Il n'existe aucune excuse justifiant le manque des denrées essentielles à la vie dans aucune partie du monde. Un tel état de pénurie indique une politique à court terme et le blocage de la libre circulation des produits indispensables pour une raison ou une autre. Toutes ces conditions déplorables sont basées sur l'égoïsme de quelque groupe ou de quelques nations, et sur le défaut de conception d'un plan impartial et sage, apte à ravitailler les humains selon leurs besoins ; cela dans le monde entier.

Alors que doit-on faire pour la libre circulation des denrées essentielles, en dehors de l'éducation des générations nouvelles, sur la nécessité de partager ? La cause de ce néfaste mode de vie est très simple. C'est le résultat des mauvaises méthodes éducatives du passé, de la compétition et de la facilité avec laquelle les faibles et les impuissants peuvent être exploités. [197]

La responsabilité n'appartient pas à un seul groupe, comme quelques idéologues fanatiques voudraient le faire croire aux ignorants. Notre période a simplement atteint le maximum de l'égoïsme humain, qui doit ou détruire l'humanité ou être aboli intelligemment.

Trois facteurs mettront fin à cette situation de grand luxe et d'extrême pauvreté, où le petit nombre mange scandaleusement trop, et le grand nombre meurt de faim, où la centralisation des produits du monde est placée entre les mains d'une poignée d'hommes dans chaque pays. Ce sont : d'abord, la reconnaissance qu'il y a assez de nourriture, de combustible, de pétrole et de minéraux dans le monde pour satisfaire aux besoins de la population tout entière. Le problème est donc, fondamentalement, celui de la distribution. Deuxièmement, le principe doit être accepté selon lequel des ressources suffisantes doivent être distribuées et les denrées essentielles à la santé, à la sécurité et au bonheur de l'humanité doivent être rendues disponibles.

Troisièmement, le problème économique tout entier et l'instauration des règles nécessaires et des agences de distribution devraient être confiés à une ligue économique des nations. Dans cette ligue, toutes les nations trouveraient place ; elles connaîtraient leurs besoins nationaux (basés sur la population, les ressources intérieures, etc.) et sauraient aussi quelle peut être leur contribution à la famille des nations. Toutes seraient animées par la volonté du bien général, volonté-de-bien qui, au début, sera probablement fondée sur la nécessité nationale du moment, mais qui sera constructive dans son application.

Certains faits sont évidents. L'ordre ancien a échoué. Les ressources du monde sont tombées entre les mains des égoïstes et il n'y a pas eu de juste distribution. Certaines nations en ont trop et ont exploité leur surplus ; d'autres en ont trop peu et leur vie nationale, leur situation financière s'en sont trouvées paralysées. À la fin de cette guerre, toutes les nations auront des difficultés financières. Toutes les nations devront se reconstruire ; toutes devront s'appliquer activement à l'instauration de la future vie économique de la planète et à sa mise au point sur des bases plus saines.

Cette période de réajustements offre l'occasion d'opérer des changements radicaux et profondément nécessaires, ainsi que d'établir [198] un nouvel ordre économique, reposant sur la contribution de chaque nation au tout, sur le partage de ce qui est fondamentalement nécessaire, sur la mise en commun de toutes les ressources au bénéfice de tous et sur un sage système de distribution. Un tel plan est réalisable.

La solution que je propose ici est si simple que pour cette raison même elle manquera peut-être d'attrait. La qualité requise chez ceux qui entreprendront ce changement du centre d'intérêt économique est également si simple – la volonté-de-bien – que là aussi on n'y prêtera peut-être pas d'attention ; mais sans simplicité et bonne volonté, bien peu de choses pourront être accomplies après la guerre. On aura grand besoin d'hommes ayant une large vision, de la sympathie, une connaissance technique et un intérêt très général. Ils devront aussi jouir de la confiance du peuple. Ils devront se réunir pour poser les règles selon lesquelles le monde pourra être nourri convenablement ; ils devront déterminer la nature et l'étendue de la contribution que peut apporter chaque nation ; ils devront fixer la nature et la quantité de marchandises à fournir à chaque nation, engendrant ainsi des conditions qui feront circuler les ressources mondiales selon la justice ; ils organiseront les mesures préventives, propres à compenser l'égoïsme et la convoitise de l'homme.

Peut-on trouver un tel groupe d'hommes ? Je le crois. Il y a partout des gens qui étudient profondément la nature humaine, des chercheurs dans le domaine de la science pleins de sympathie pour les êtres humains, des hommes et des femmes consciencieux qui depuis longtemps, dans l'ancien et cruel système, sont aux prises avec le problème de la douleur et des besoins humains.

Cette ère nouvelle de simplicité doit arriver. Le nouvel ordre mondial inaugurera cette vie plus simple, basée sur une nourriture adéquate, une pensée juste, une activité créatrice et le bonheur. Ces facteurs essentiels ne sont possibles qu'avec une juste réglementation économique. Cette simplification et cette sage distribution des ressources mondiales devront concerner les supérieurs et les inférieurs, les riches et les pauvres, servant ainsi tous les hommes également.

Le problème du gouvernement

Venons-en maintenant au problème du gouvernement dans le nouvel ordre mondial ; nous sommes face à une situation très complexe. Certains [199] grands régimes idéologiques ont divisé le monde en groupes opposés. Il y a les grandes démocraties, au sein desquelles les quelques monarchies existant encore trouvent place ; il y a les puissances totalitaires, qui résument les anciennes dictatures et autocraties. Il n'y a rien de nouveau dans la politique de l'Axe. Il s'agit essentiellement de groupes réactionnaires, car les tyrans, la cruauté et l'exploitation des faibles font partie de l'histoire du passé. Les démocraties, malgré toute leur inefficacité actuelle, portent en elles le germe de ce qui est vraiment nouveau, car elles sont l'expression de l'émergence, dans l'humanité tout entière, du gouvernement par soi-même et de la maîtrise de soi. Il y a aussi l'idéal communiste qui est un curieux mélange d'individualisme, de dictature, de l'ancien conflit entre travail et capital, du Sermon sur la Montagne et des pires aspects de la révolution et de l'exploitation. La direction qu'il va prendre, même dans l'avenir immédiat, est imprévisible. Il y a d'autres pays et d'autres peuples qui sont conditionnés par leur environnement et qui, à l'heure actuelle, ne jouent pas un rôle déterminant dans les événements mondiaux, si ce n'est dans la mesure où les grandes puissances les utilisent. Puis il y a les peuples et les tribus qui poursuivent encore leur petite vie, sans être troublés par l'agitation qui existe dans les parties plus civilisées du monde.

Derrière la diversité des méthodes gouvernementales, surgissent clairement certains profils qui indiquent de plus larges fusions et une tendance à réaliser certaines synthèses. Des courants de pensée, fondamentaux et divers, apparaissent qui, dans le nouvel ordre mondial, s'épanouiront en une synthèse majeure très désirée par la Hiérarchie spirituelle et qui, tout en conservant des éléments nationaux et raciaux, produiront un état d'esprit subjectif et sous- jacent lequel mettra fin à l'ère de la séparativité. On évoque, aujourd'hui, un désir d'États fédérés d'Europe, sur le modèle du Commonwealth britannique ou des États-Unis d'Amérique ; on parle d'un ordre nouveau en Asie, d'une politique de Bon Voisinage en Amérique, d'une Union fédérale des nations démocratiques. Il y a aussi l'expansion régulière des Républiques socialistes soviétiques. [200] Certains groupements majeurs semblent possibles et probablement judicieux. On pourrait les envisager de la façon suivante :

1. Une union fédérale des grandes démocraties, après la guerre, qui pourrait inclure tout l'Empire britannique, les États-Unis, les pays scandinaves et certaines nations du nord de l'Europe, Allemagne comprise.

2. Une Union des pays latins, comprenant la France, l'Espagne, tous les pays méditerranéens, les Balkans (excepté un ou deux pays qui pourraient être absorbés par l'U.R.S.S.), et l'Amérique latine.

3. L'Union des Républiques socialistes soviétique et certaines nations asiatiques, collaborant avec elles, telles que la Chine, et plus tard le Japon.

Ces trois grands blocs ne seraient pas antagonistes, mais simplement des sphères géographiques d'influence. Ils travailleraient tous trois dans l'unité et la relation économique la plus étroite. Chaque nation, dans ces trois blocs, conserverait son indépendance souveraine ; mais entre ces nations indépendantes et entre ces blocs, il y aurait identité d'intention, unité d'effort et reconnaissance d'un contrôle économique, exercé par une ligue de nations. Cette ligue, comportant des représentants de toutes les nations, et son corps gouvernemental interne étant choisi par les trois blocs, aurait la haute main sur toutes les sources de ravitaillement, distribuerait ce dernier dans sa totalité et déterminerait toute politique économique.

Je n'entrerai pas dans les détails de ces futures mises au point. Ceux-ci doivent être élaborés par les hommes de bonne volonté, dans le creuset de l'expérimentation et de l'expérience. Seul un désastre universel pouvait provoquer chez les hommes un état d'esprit où de telles solutions et de telles propositions pouvaient être présentées. Il est très précieux que tout le monde reconnaisse l'échec lamentable de l'ordre ancien.

Le problème religieux

Lorsque nous envisageons la religion dans le nouvel ordre [201] mondial, nous nous trouvons en face d'un problème bien plus compliqué et en même temps beaucoup plus facile. La raison en est que la question religieuse a été étudiée, et un peu comprise, par la majorité des hommes. Sur les interprétations théologiques, il y a d'énormes différences ; sur une large reconnaissance d'une Intelligence divine universelle ou Dieu, (quel que soit le nom qu'on donne à cette Vie universelle), il y a généralement des réactions semblables. Les formes des religions sont si différentes, et les adhérents de la théologie sont si acharnés dans leur loyalisme et leur sectarisme, que l'apparition d'une religion mondiale est inévitablement très difficile. Mais cette apparition est très proche et les différences sont relativement superficielles. La nouvelle religion mondiale est plus proche que beaucoup ne pensent ; ceci est dû à deux facteurs : premièrement, les querelles théologiques reposent surtout sur des points non essentiels et, deuxièmement, la jeune génération est fondamentalement spirituelle, mais ne s'intéresse nullement à la théologie.

La jeunesse intelligente de tous les pays rejette rapidement la théologie orthodoxe, le cléricalisme d'état et la domination de l'Église. Les jeunes ne s'intéressent ni aux interprétations humaines de la vérité, ni aux querelles du passé entre religions majeures. Par ailleurs, ils s'intéressent profondément aux valeurs spirituelles et cherchent ardemment la vérification de leurs muettes et profondes reconnaissances. Ils ne recherchent ni bible, ni système de prétendue connaissance et révélation spirituelle, mais leur regard est fixé sur un grand tout mal défini, où ils cherchent à se fondre et à se perdre, tel que l'État, une idéologie, ou l'humanité. Dans cette expression de l'esprit d'abnégation, on voit apparaître la vérité la plus profonde de toute religion et la justification du message chrétien. Le Christ, dans sa haute demeure, se soucie peu de voir les hommes accepter ou non les interprétations théologiques des savants et des hommes d'Église ; ce qui lui tient à cœur, c'est que la note-clé de sa vie de sacrifice et de service soit reproduite parmi les hommes. Il lui est indifférent que l'accent mis sur le détail et la véracité de l'Évangile soit reconnu et accepté, car il s'intéresse davantage à ce que se poursuive la recherche de la vérité et de l'expérience spirituelle subjective. Il sait que dans [202] chaque cœur humain se trouve ce qui répond instinctivement à Dieu, et que l'espoir de la gloire ultime réside dans la conscience christique.

Donc, dans l'ordre mondial nouveau, la spiritualité va remplacer la théologie ; l'expérience vécue prendra la place de l'acceptation théologique. Les réalités spirituelles vont émerger de plus en plus clairement et l'aspect forme va se retirer à l'arrière-plan ; la vérité dynamique et expressive sera la note-clé de la nouvelle religion mondiale. Le Christ vivant prendra sa juste place dans la conscience humaine et verra le fruit de ses plans, de son sacrifice et de son service ; l'emprise des ordres ecclésiastiques s'amenuisera et disparaîtra. Seuls demeureront, en tant que guides de l'esprit humain, ceux qui parleront par expérience vécue et qui ne connaîtront aucune barrière de croyances ; ils reconnaîtront la marche en avant de la révélation, et les nouvelles vérités seront basées sur d'anciennes réalités, mais seront adaptées aux besoins modernes ; elles manifesteront progressivement la révélation de la nature et de la qualité divines, Dieu est maintenant connu comme Intelligence et Amour. Cela, le passé nous l'a donné. Il faudra qu'il soit connu comme Volonté et Dessein ; c'est ce que l'avenir révélera.

Quand le problème racial aura disparu par la reconnaissance de la Vie Une ; quand le problème économique aura été résolu par les nations travaillant en coopération ; quand le problème d'un bon gouvernement au sein de chaque nation aura été déterminé par le libre arbitre de chaque peuple respectivement et quand l'esprit de la vraie religion ne sera plus entravé par les formes et les interprétations anciennes, alors nous verrons un monde sur la voie de l'expérience juste, des relations humaines justes et du progrès spirituel vers la réalité.

Une étude de ces quatre grandes lignes de la vie humaine montrera combien il est vrai que l'Allemagne est aujourd'hui le point focal de la situation mondiale. Dans cette malheureuse nation, le problème racial a atteint une telle importance que le monde entier en est affecté. Du point de vue économique, Hitler a dit que l'Allemagne était obligée de se battre pour sauvegarder la vie économique de son peuple ; en fait, la vie économique de l'Allemagne n'était pas aussi sérieusement menacée que celle de nombreuses nations plus petites. Le [203] problème de gouvernement était aussi arrivé à un point critique, à cause de l'activité et des conquêtes de l'Allemagne et aussi à cause de l'accent mis par les puissances de l'Axe sur la relation entre l'État et l'individu. L'attitude des chefs de l'Allemagne, en ce qui concerne la religion, est un antagonisme prononcé. Ainsi donc, les quatre problèmes mondiaux majeurs sont aujourd'hui précipités dans l'arène de l'action par l'Allemagne ; partout ils suscitent l'enquête ; l'attention des hommes de tous les pays converge maintenant sur ces problèmes ; et une solution est inévitable après la guerre. Quand ces questions seront abordées correctement par les hommes de bonne volonté, nous verrons alors un "plan mondial" pour l'instauration d'une vie harmonieuse telle que jusque là elle n'avait pas été possible.

C'est à l'humanité de résoudre ses graves problèmes sur la base de la fraternité et d'introduire un genre de vie qui fournira un ravitaillement adéquat pour les nécessités de la vie, grâce à une bonne organisation du temps et du travail. Cela conduira à un échange entre le citoyen et l'État, qui suscitera le service chez l'individu et une protection correcte de la part de l'État. L'humanité sera alors libre pour l'expérience d'une vie spirituelle et celle-ci s'exprimera par une vie humaine éveillée. Peut-on demander plus ou s'attendre à davantage ? Un tel mode de vie sera rendu possible si les hommes et les femmes de bonne volonté, intelligents et idéalistes, peuvent se mettre à la tâche consistant à instaurer le nouvel ordre mondial.

IV. La tâche de l'avenir

Ceci nous amène à l'aspect pratique de la question et à la nécessité de répondre à la question suivante : Étant donné la possibilité du nouvel ordre mondial, que peut-on faire, en ce moment, au milieu du conflit, pour préparer son apparition ?

La période dans laquelle nous entrons se divise en deux parties :

1. L'actuelle période de la guerre, allant jusqu'à la défaite de l'Allemagne et la fin du combat véritable. [204]

2. La période qui viendra quand les canons auront cessé de tonner. La paix et la reconstruction nécessaire devront alors être déterminées.

C'est de ces périodes qu'il faut nous occuper. Elles sont et seront des moments de grande difficulté, de conflit pénible et de réajustements. La tâche de restaurer l'harmonie et l'ordre dans le monde est considérable. L'éducation des gens, en tous lieux, sur la nécessité de nouveaux idéaux de vie correcte, de nouveaux rythmes, d'un nouvel esprit de partage, ne sera pas chose facile. Le travail de guérison des plaies de l'humanité, de reconstruction de la civilisation brisée, d'instauration du désarmement, de reconnaissance des besoins nationaux, matériels et psychologiques, ainsi que de sauver et restaurer le bonheur des enfants du monde et de prévoir leur future sécurité, fera appel à tout ce qu'il y a de meilleur chez les hommes et femmes de bonne volonté ; cela demandera une sage direction de la part du Nouveau Groupe des Serviteurs du Monde et retiendra l'attention de toutes les personnes intelligentes et compréhensives de chaque nation.

En premier lieu, il faut que les hommes de bonne volonté décident, une fois pour toutes, de quel côté des forces combattantes ils vont se ranger, mentalement et spirituellement, même si leur pays ne leur impose pas un choix physique. En ce moment, j'écris pour ceux qui prennent position aux côtés des forces constructrices, qui luttent pour les valeurs démocratiques et la liberté des peuples. Je voudrais ici vous rappeler que, parmi le peuple allemand et italien, il est des milliers de personnes qui, en silence, ont choisi le parti de ceux qui se battent pour la défaite des puissances de l'Axe. Ceci ne doit jamais être oublié, car de telles personnes existent en grand nombre dans les pays totalitaires. Les Forces de Lumière se trouvent dans tous les pays, mais actuellement elles ne peuvent s'exprimer efficacement que dans les pays opposés à l'Allemagne.

Les hommes de bonne volonté, associés au Nouveau Groupe des Serviteurs du Monde, devraient s'efforcer de comprendre intelligemment le problème actuel et d'étudier la situation mondiale sous tous [205] les angles possibles. Une compréhension intelligente, l'amour de ses semblables et un solide bon sens sont les conditions préalables de tout service requis. Les hommes devraient cultiver ces qualités, sans émotion sentimentale, en traitant avec réalisme les circonstances et les conditions environnantes. Il faut bien comprendre que la tâche à accomplir prendra du temps et que les hommes de bonne volonté doivent rassembler leurs forces, en vue d'un effort soutenu, face à l'opposition, à la profonde léthargie, à l'inertie maladive qui affligent les masses dans tous les pays. Les activités immédiates sont au nombre de deux :

1. Découvrir ceux qui, dans tous les pays, réagissent à la vision du nouvel ordre mondial et qui sont des hommes de bonne volonté.

2. Les charger de présenter les possibilités futures aux masses dans tous les pays.

Je voudrais vous rappeler que les membres du Nouveau Groupe des Serviteurs du Monde, ainsi que les hommes et femmes de bonne volonté, doivent être recherchés dans tous les domaines de la vie. On les trouvera parmi ceux qui adhèrent aux idéologies contemporaines, dans les cercles politiques et scientifiques, parmi les éducateurs et les philanthropes, parmi les créateurs, les industriels, les foyers normaux et parmi les ouvriers.

Le Nouveau Groupe des Serviteurs du Monde

Le Nouveau Groupe des Serviteurs du Monde n'est pas une organisation nouvelle qui se crée dans le monde. C'est simplement un lien entre tous les hommes de bonne volonté, aux buts de paix constructifs, qui mettent l'accent sur la nécessité primordiale de l'établissement de justes relations humaines, avant qu'une paix durable soit possible. Ce groupe ne contrecarre nullement la fidélité et le loyalisme de n'importe quelle personne. C'est un ralliement de tous ceux qui cherchent à exprimer l'esprit du Christ et qui ignorent la haine et la vengeance. Ce groupe propose au monde d'oublier tout antagonisme, toute antipathie, toute haine et toute différence raciale, et d'essayer de vivre en tant que famille unique, vie unique, humanité unique. [206]

Le Nouveau Groupe des Serviteurs du Monde croit qu'au moyen de la bonne volonté l'ordre mondial nouveau peut être fermement établi sur terre. Aujourd'hui, dans la période intérimaire de la guerre, la préparation de la reconstruction peut être conduite simultanément à l'effort de victoire sur les puissances totalitaires. Ce n'est pas dans la note de sacrifice que les hommes de bonne volonté doivent puiser l'énergie de leurs activités. La guerre a déjà beaucoup exigé d'eux dans ce sens. C'est la note claironnante de la joie par l'activité de bonne volonté qui doit se faire entendre. Que la beauté de ce qui est possible, la splendeur de la vision, de la reconstitution physique, scientifique et spirituelle de l'humanité se dressent devant leurs yeux, leur inspirant un effort renouvelé.

Grâce au travail fait précédemment dans le monde entier par des hommes de vision et de bonne volonté, il existe aujourd'hui des milliers de personnes en Europe, en Amérique et ailleurs, qui attendent d'être guidées vers une juste activité. Dans tous les pays, on trouve des hommes de bonne volonté, prêts à répondre à un appel clair et à une organisation intelligente au service de la reconstruction. Qu'on les trouve !

Le message à enseigner avant toute paix future consiste en trois vérités claires et pratiques que voici :

1. Les erreurs des siècles passés, dont le point culminant est la guerre mondiale actuelle, sont les erreurs conjointes de l'humanité tout entière. Le reconnaître conduira à établir le principe du partage, si nécessaire aujourd'hui dans le monde.

2. Il n'existe aucun problème ni aucune condition qui ne puisse être résolu par la volonté-de-bien. La bonne volonté nourrit un esprit de compréhension et favorise la manifestation du principe de coopération. Cet esprit de coopération est le secret de toute relation humaine juste et l'ennemi de la compétition.

3. Il existe une relation de sang entre les hommes qui, lorsqu'elle sera reconnue, fera tomber toutes les barrières, et mettra fin à l'esprit de séparativité et de haine. La paix et le bonheur de [207] chacun est donc le souci de tous, ce qui développe le principe de la responsabilité et pose les bases d'une action collective correcte.

Ce sont les croyances fondamentales des hommes de bonne volonté qui fournissent un stimulant à tout service et à toute action. Ces trois vérités scientifiques et pratiques représentent les trois faits de base et l'acceptation de tous les serviteurs du monde. Elles ne sont contraires à aucune position mondiale, ni subversive vis-à-vis d'aucun gouvernement ou attitude religieuse ; elles sont innées dans la conscience de chaque homme et suscitent une réponse immédiate. L'acquiescement à ces vérités "guérira" les maux internationaux.

J'appelle tous les hommes de bonne volonté du monde à une étude des principes du nouvel ordre mondial. Je leur demande, alors qu'ils luttent pour la justice et les droits des petites nations, pour l'avenir des enfants de tous pays, de commencer à éduquer ceux qu'ils peuvent atteindre, en vue d'attitudes correctes et de la vision d'avenir qui rendra plus tard impossibles les erreurs du passé.

L'un des attributs divins fondamentaux n'est pas encore aussi fort qu'il devrait l'être dans l'humanité : l'attribut du pardon. Il est encore associé à la magnanimité et regardé comme une condition essentielle des futures relations entre les nations, condition basée sur la constatation de notre commune humanité. L'Allemagne, égarée par ses mauvais gouvernants, a besoin de pardon. Toutes les Grandes Puissances ont aussi péché à quelque degré, toutes se sont trompées dans le passé. L'Allemagne a précipité le mal survenu dans le monde, mais elle porte en elle-même les semences de sa propre punition ; ces semences ne se développeront pas si un châtiment excessif lui est infligé de l'extérieur.

Reconnaître trois points sauvera le monde, lorsque les canons se seront tus :

1. Reconnaître la responsabilité conjointe, concernant les conditions mondiales du passé. La vérité que "nous avons tous péché" doit être regardée en face.

2. Reconnaître que, bien que le peuple allemand ait eu la faiblesse d'accepter la domination d'Hitler, il est fondamentalement victime d'une tromperie organisée. Depuis 1914 on [208] ne lui a dit que des mensonges. L'ordre mondial futur inaugurera une ère de propagande véridique, d'information nationale et internationale.

3. Reconnaître que le passé, avec tous ses maux, est derrière nous, et qu'un avenir de possibilités illimitées s'offre à nous pour des changements favorables et constructifs. L'avenir doit être développé par toutes les nations, dans la plus étroite collaboration.

Ces trois points doivent être constamment présentés au public, dans le langage le plus simple, car c'est la masse inerte des gens qui ne pensent pas qui va constituer la difficulté principale. Il faut faire appel à ce qu'il y a de meilleur en eux, car la tâche immédiate de l'avenir sera le développement d'attitudes correctes sans lesquelles aucune paix ne pourra durer, aucune justice ne sera possible. La paix ne doit pas être imposée par ceux qui détestent la guerre. La paix doit être le résultat naturel, l'expression de l'esprit humain, ainsi que la détermination de transformer l'attitude mondiale en relations humaines justes.

Ceci n'est pas un rêve imaginaire et impossible, mais une possibilité immédiate, s'il existe un esprit de pardon et de bonne volonté. Il faudra de la patience, car la tension nerveuse de la guerre, la douleur, l'angoisse, la peur et la malnutrition entreront en ligne de compte. Les êtres humains seront les mêmes qu'avant la guerre, sauf qu'ils seront épuisés et, pour la plupart, prêts à accepter n'importe quelles conditions, pourvu qu'ils puissent, à nouveau, vivre tranquillement, débarrassés de la peur immédiate des bombes, de la faim et de la ruine. Le grand impératif sera d'agir lentement, de prévoir du temps pour les nécessaires processus de guérison et de réajustement, avant que des conditions de paix définitive ne puissent être fixées par les nations, réunies en conclave. Les nations devront passer d'un régime de guerre à des activités réglées de paix, des tensions organisées de la guerre à la relative détente de la paix. La première mesure consistera à faire progresser le désarmement, mais de manière à ne pas aggraver indûment la question du chômage. La transformation "des canons en charrues" doit se faire avec jugement ; seul un vaste plan international pourra venir à bout de ce considérable [209] processus. La fixation des frontières nationales et des sphères d'influence sera d'une extrême difficulté et ne pourra être déterminée de façon satisfaisante que si la bonne volonté est activement présente et utilisée consciemment et lorsque les vœux de la population impliquée auront été précisés dans une consultation impartiale. L'accent mis sur les anciennes frontières historiques, en tant que facteur déterminant, est toujours dangereux. Une action sage et lente sera ici nécessaire, tenant correctement compte des désirs de la population. Ce n'est pas le rétablissement des anciennes limites qui est souhaitable, mais le rétablissement des sphères nationales et raciales d'influence, en harmonie avec la situation présente.

Ce qui est important n'est pas d'imposer une idéologie particulière au monde ou de la faire disparaître, mais d'établir des conditions mondiales qui fourniront à toutes les nations assez de nourriture, tout ce qui est nécessaire à la vie, l'occasion de s'exprimer et d'apporter leur contribution unique au bien-être de toute la famille des nations.

Les détails devront être élaborés par tous les peuples en très étroite collaboration. Des hommes de vision et non simplement des hommes politiques ; des serviteurs du monde et non simplement des chefs militaires ; des personnes qui aiment l'humanité et non simplement les gouvernants des nations, devront déterminer ces questions d'importance considérable. Dans leur action, il faudra qu'ils puissent compter sur le soutien des hommes de bonne volonté de tous les pays. Pour résumer :

L'intérim entre le temps présent et la mise au point finale se divise en deux périodes majeures, et le travail pratique à accomplir dans chacune d'elles peut être clairement défini :

1. L'intérim entre aujourd'hui et la cessation des hostilités doit être utilisé de la manière suivante :

a. Pour éduquer et stabiliser les hommes de bonne volonté.

b. Pour découvrir des travailleurs, des personnes qui aiment l'humanité, qui comprennent et ont la vision, qui répondront aux principes énoncés ici.

c. Pour préparer ces hommes à travailler à l'unisson pour la justice et les justes relations humaines dans tous les pays, après la fin de la guerre. [210]

2. L'intérim entre la fin du combat physique et le règlement de paix définitif. Espérons – pour la sauvegarde de la justice – que cet intermède couvrira plusieurs années de réhabilitation et d'éducation. Pendant ces intermèdes entre l'ordre ancien et l'ordre nouveau, les hommes de bonne volonté peuvent aider activement les hommes d'État de toute nation par leur coopération intelligente, afin de centrer, selon un plan, l'opinion publique éclairée, de définir et d'enseigner le vrai sens des relations humaines.

C'est le premier intermède qui nous concerne actuellement.

Il est souhaitable d'entrer en contact immédiatement avec ceux dont vous connaissez déjà les noms, de les mettre au travail, de les laisser – à leur tour – trouver d'autres personnes et les guider aussi sur la voie de la reconstruction. Que tous ces noms et toutes ces adresses soient rassemblés sur des listes de correspondance centrales ou nationales, mais qu'on les tienne à la fois à Londres et à New York, car c'est la tâche des peuples de langue anglaise de reconstruire le monde, avec l'aide de toutes les autres nations. Il faut donc une certaine mesure de centralisation du travail, une manière d'atteindre ces personnes et de les enrôler dans une activité de coopération.

Avec de la bonne volonté envers tous, avec une croyance ferme dans les possibilités divines des êtres humains et dans la résurrection future de l'humanité, avec une reconnaissance exaltée de Dieu et des valeurs fondamentales de l'enseignement du Christ, avec une joyeuse détermination d'aller de l'avant dans le travail de reconstruction, que tous ceux qui répondent à cette vision se mettent immédiatement au travail.