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REGLE UN

REGLE UN

Fonction et existence du groupe

Nous commençons maintenant notre étude des quatorze règles s'adressant à ceux qui recherchent l'initiation, quelqu'en soit le degré. Dans Initiation Humaine et Solaire j'ai donné les règles destinées à ceux qui se proposent d'entrer dans les rangs des disciples. Je souhaiterais m'arrêter un moment sur le sens du mot "Règle" et vous donner une idée de son sens occulte. Il y a beaucoup de différence entre une loi, un ordre ou commandement, et une règle ; il faut réfléchir avec soin à ces distinctions. Les lois de l'univers sont simplement les modes d'expression, l'élan vital et la manière de vivre ou activité de Celui en qui nous avons la vie, le mouvement et l'être. En dernière analyse, il est impossible d'éviter ces lois ou de les nier, car éternellement elles nous plongent dans l'activité et, sous l'angle de l'Éternel Présent, elles gouvernent et dominent tout ce qui arrive dans le temps et l'espace. Les ordres et les commandements sont les faibles interprétations que font les hommes de ce qu'ils comprennent par "loi". Dans le temps et l'espace, à un moment donné ou en un lieu donné, ces ordres émanent de ceux qui sont en position d'autorité, ou semblent dominer, ou sont en mesure d'imposer leur volonté. Les lois sont occultes et fondamentales. Les ordres indiquent la fragilité et les limitations humaines.

Les règles, cependant, sont différentes. Elles résultent de l'expérience éprouvée et d'entreprises s'étendant sur des siècles ; vu qu'elles ne présentent ni la forme des lois, ni les limitations des ordres, elles sont reconnues par ceux à qui elles s'adressent et suscitent chez eux une prompte réponse intuitive. Elles n'ont pas à être imposées, mais elles sont acceptées volontairement et mises à l'épreuve dans la foi que le témoignage du passé et l'attestation des siècles justifient l'effort qu'exigent les conditions requises.

Ceci est vrai des quatorze Règles que nous allons étudier maintenant. Je souhaite vous rappeler que seule la conscience de l'initié comprendra vraiment leur signification, et aussi que votre effort pour [26] comprendre développera chez vous le début de cette conscience d'initié, pourvu que vous cherchiez à appliquer pratiquement ces règles dans votre vie quotidienne. Elles ont trois formes d'application – physique, émotionnelle et mentale – et une quatrième très bien décrite par les mots "réponse de la personnalité intégrée à l'interprétation et à la compréhension de l'âme".

Un autre point sur lequel je souhaite attirer votre attention, avant d'interpréter cette règle, est que votre effort de groupe devra rechercher l'application de groupe, la signification de groupe et la lumière de groupe. Je désire insister particulièrement sur les mots "lumière de groupe". Nous traitons donc de quelque chose de fondamentalement nouveau dans le domaine de l'enseignement occulte et, de ce fait, la difficulté d'une compréhension intelligente est grande. Les vraies significations ne sont pas celles toutes simples qui apparaissent à la surface. Les termes de ces règles semblent presque rebattus et familiers. Si leur sens était exactement ce qu'il paraît être, il n'y aurait pas lieu que je vous donne des indications quant aux significations et idées sous-jacentes. Mais ce n'est pas si simple.

En résumé donc : ces règles doivent être lues, en s'aidant d'un sens ésotérique grandissant ; elles se rapportent à l'initiation de groupe, bien qu'elles puissent être appliquées individuellement ; elles ne sont pas ce qu'elles semblent être à la surface, c'est-à-dire des truismes rebattus et des platitudes spirituelles ; mais ce sont des règles concernant l'initiation qui, si elles sont observées, conduisent le disciple et le groupe à faire une grande expérience spirituelle. Elles incarnent les techniques de l'âge nouveau, qui exigent une action de groupe, une méthode de groupe et l'unité dans l'action. Plus haut, j'ai dit que ces règles étaient le résultat d'une expérience éprouvée, et, lorsque j'emploie le mot "nouveau", il se rapporte à la connaissance humaine et non à la méthode initiatique. Celle-ci a toujours existé, et toujours, lors des grandes crises d'initiation les disciples ont avancé en groupe, même s'ils n'en avaient pas conscience. Aujourd'hui, les disciples sont capables d'en prendre conscience ; les ashrams des divers rayons ne présenteront pas leurs groupes (grands ou petits) à l'Initiateur, mais les membres de ces groupes prendront [27] conscience de la présentation en formation de groupe. Les disciples devront aussi saisir le fait que l'étendue de leur connaissance dépend de leur décentralisation. Je vous demande de réfléchir à cette dernière affirmation.

Examinons maintenant la Règle I.

Règle I

Que le groupe se tienne dans le feu du mental, focalisé dans la claire lumière de la tête. Le terrain ardent a fait son œuvre. La lumière claire et froide rayonne ; elle est froide et pourtant la chaleur – suscitée par l'amour de groupe – permet à la chaleur dynamique de s'extérioriser. La Porte est en arrière du groupe. Devant lui s'ouvre la Voie. Qu'ensemble et en groupe, les frères s'avancent, qu'ils sortent du feu, entrent dans le froid et se dirigent vers un nouveau point de tension.

Nous avons avantage à prendre cette règle phrase par phrase, et à essayer d'arracher à chacune d'elles sa signification de groupe.

1. Que le groupe se tienne dans le feu du mental, focalisé dans la claire lumière de la tête.

Dans cette phrase, vous avez l'idée de perception intellectuelle et d'unité focalisée. La perception intellectuelle n'est pas la compréhension mentale, mais c'est en réalité la raison claire et froide, le principe bouddhique en action et l'attitude focalisée de la Triade spirituelle vis-à-vis de la personnalité. J'attire votre attention sur les analogies suivantes :

Tête

Monade

Atma

Dessein

Cœur

Âme

Buddhi

Raison pure

Base de la colonne vertébrale

Personnalité

 

Manas

 

Activité spirituelle

 

Ces mots vous indiquent donc la position de la personnalité lorsqu'elle se trouve au point de pénétration de l'antahkarana, là où elle entre en contact avec manas ou mental inférieur et elle est ainsi l'agent du dessein de la Monade, utilisant la Triade spirituelle, laquelle – comme vous le savez – est reliée à la personnalité par l'antahkarana.

Le cœur en tant qu'aspect de la raison pure doit être examiné soigneusement. D'ordinaire, il est considéré comme l'organe de l'amour [28] pur, mais – sous l'angle des sciences ésotériques – amour et raison sont synonymes ; je souhaite vous voir réfléchir à la raison de ceci. Le terme amour désigne essentiellement le motif sous-jacent de la création. Tout motif, cependant, présuppose un dessein conduisant à l'action. Il s'ensuit que, dans la tâche assumée par la vie de groupe de la Monade incarnée, il arrive un moment où le motif (cœur et âme) est dépassé spirituellement, car le dessein est parvenu à un certain point de réalisation et l'activité déclenchée est telle que ce dessein ne peut pas être arrêté. Le disciple ne peut plus alors être détourné, et aucune entrave ou difficulté n'est assez puissante pour l'empêcher d'aller de l'avant. C'est alors que se produit la destruction de ce que les théosophes appellent le corps causal, et que s'établit une relation directe entre la Monade et son expression tangible sur le plan physique. Le centre de la tête et le centre au bas de l'épine dorsale seront en relation directe et sans obstacles ; de même, la volonté monadique et la volonté de la personnalité auront une relation semblable, sans obstacle, via l'antahkarana. Je vous demande de vous rappeler que l'aspect volonté est le principe qui domine finalement.

Dans l'application de groupe de ces idées, le même développement fondamental et profond doit se faire ; un groupe de disciples doit être caractérisé par la raison pure, qui remplacera de plus en plus le motif, se fondant finalement dans l'aspect volonté de la Monade, son aspect majeur. En termes techniques, c'est Shamballa en relation directe avec l'humanité.

Qu'est donc la volonté de groupe dans le groupe d'un Maître ou ashram ? Existe-t-elle sous une forme suffisamment vitale pour déterminer la nature des relations de groupe et lier les membres comme des frères, s'avançant dans la lumière ? La volonté spirituelle des personnalités est-elle assez forte pour supprimer toute relation personnelle et conduire à la reconnaissance spirituelle, à l'échange spirituel et à la relation spirituelle ? C'est seulement compte tenu de ces effets fondamentaux dus à ce que le groupe se tient dans "la claire lumière de la tête", qu'il est permis aux disciples d'introduire, dans ce cadre, leur sensibilité et leurs pensées personnelles, et ceci uniquement parce que le groupe a des limitations temporaires. [29]

Qu'est-ce donc qui empêche le disciple – en tant qu'individu – de s'approcher du Maître directement et d'entrer en contact direct avec lui, sans dépendre d'un intermédiaire ? Permettez-moi d'illustrer ceci : Dans le groupe que j'instruis (L'État de Disciple dans le Nouvel Âge, Vol. I et II), deux ou trois disciples ont la possibilité de m'approcher directement ; d'autres l'ont, mais ne le savent pas ; d'autres encore sont des disciples bien intentionnés et travaillant dur, mais jamais ils ne s'oublient, ne serait-ce qu'une seconde ; l'un d'eux a eu un problème de mirage et a maintenant un problème d'ambition spirituelle qui se manifeste dans une très petite personnalité ; certains pourraient faire des progrès rapides, mais ils sont trop enclins à l'indolence ; peut-être pourrais-je dire qu'ils sont trop indifférents. Chacun d'eux (et tout autre disciple) peut lui-même se situer. Tous désirent avancer et ont une forte vie spirituelle intérieure ; c'est pourquoi je trouve le temps de travailler avec eux. Mais l'antahkarana de groupe est encore incomplet et l'aspect de la raison pure et du cœur ne domine pas. La puissance d'évocation de la Triade spirituelle n'est donc pas suffisante pour maintenir la stabilité de la personnalité, et le pouvoir invocatoire de la personnalité n'existe pas, envisagé sous l'angle des personnalités du groupe, constituant l'aspect personnalité de l'ashram. Ils ont souvent pensé que c'est un facteur dont je n'ai pas à traiter. Ce facteur ne peut devenir puissant que si certaines relations personnelles sont mises au point et l'indolence surmontée. Alors, et seulement alors, "le groupe pourra exister".

2. Le terrain ardent a fait son œuvre.

Ici, un malentendu est très possible. Pour la plupart des gens, le terrain ardent représente l'une des deux choses suivantes :

a. Soit le feu du mental consumant, dans la nature inférieure, ce dont il prend de plus en plus conscience.

b. Soit le terrain ardent du chagrin, de l'angoisse, de l'horreur et de la douleur, qui est le trait caractéristique de la vie dans les trois mondes surtout à l'heure actuelle.

Mais le terrain ardent dont il s'agit ici est quelque chose de très [30] différent. Quand l'ardente lumière du soleil est correctement focalisée dans un miroir, elle peut engendrer le feu. Quand l'ardente lumière de la Monade est focalisée directement sur la personnalité, via l'antahkarana et non particulièrement via l'âme, elle produit un feu ardent qui consume tous les obstacles, selon un processus suivi et régulier. En d'autres termes, quand l'aspect volonté, affluant de la Monade, se focalise dans la volonté personnelle (telle que le mental peut la saisir et en avoir conscience), elle détruit, comme par le feu, tous les éléments de la volonté du petit soi. Quand l'énergie de Shamballa se déverse et prend contact directement avec l'humanité (en évitant la transmission par la Hiérarchie, qui jusque là avait été habituelle), il se produit ce que nous voyons dans le monde aujourd'hui, une conflagration destructrice ou terrain ardent mondial. Quand l'antahkarana de groupe sera correctement construit, la volonté de groupe individualisée disparaîtra dans la pleine conscience du dessein monadique, ou volonté claire et dirigée. Voilà des points que le disciple se préparant à l'initiation doit examiner lorsqu'il s'agit d'initiations supérieures, et ce sont des points que tout groupe ou ashram se préparant à l'initiation doit aussi examiner.

Le secret des initiations supérieures réside dans l'utilisation compétente de la volonté supérieure. Il ne réside pas dans la purification ou la discipline de soi, ou dans des moyens qui, dans le passé, ont servi à intercepter la vérité. Tout ce problème de la volonté de Shamballa est en cours de révélation, et finira par modifier complètement la manière dont le disciple de l'âge nouveau abordera l'initiation. Le thème de "la Voie conduisant à Shamballa" exige réflexion, étude, et compréhension ésotérique. Dans ce concept de la nouvelle et future section (si je puis employer ce terme) de la Voie ou Sentier qu'affronte le disciple moderne réside le secret de la future révélation et de la dispensation spirituelle qui apparaîtra à mesure que l'humanité construira la nouvelle civilisation mondiale et commencera à formuler la nouvelle culture. La volonté monadique, dont l'effet consume, purifie, détruit son reflet déformé – la volonté individuelle – mérite une profonde considération.

Depuis longtemps, les étudiants ont remarqué, et on leur a enseigné, l'effet de la volonté sur le corps astral ou émotionnel. C'est l'une [31] des tensions primordiales, et très élémentaires enseignées sur le Sentier de Probation. Elle conduit à la purification et à la réorganisation de toute vie psychique et émotionnelle, du fait de son action destructrice. "Si vous vouliez bien penser", "si vous vouliez bien y mettre un peu de volonté", "si vous vouliez bien vous souvenir que vous avez un mental" disons-nous aux enfants et à ceux qui viennent d'entrer sur le Sentier du Retour conscient. Petit à petit, le point focal et l'orientation se déplacent de la vie astrale et du niveau de conscience émotionnel vers le niveau mental, et donc vers le reflet, dans les trois mondes, du monde du dessein. Quand ce stade a atteint un certain développement, survient alors, sur le Sentier du Disciple et de préparation à l'initiation, un effort pour saisir les aspects supérieurs de ce processus mental ; l'aspect volonté de la vie égoïque commence à influencer le disciple. Les "pétales de sacrifice" se déploient et l'aspect sacrificiel sacré de la vie se révèle dans toute sa beauté, sa pureté, sa simplicité et sa qualité révolutionnaire.

Sur le Sentier de l'Initiation, la volonté monadique (dont la volonté égoïque est le reflet et la volonté du soi individuel la distorsion) est progressivement transmise de façon directe, via l'antahkarana, à l'homme sur le plan physique. Cela produit la correspondance supérieure des qualités dont l'ésotériste exercé, mais obtus, parle avec tant de volubilité – la transmutation et la transformation. Il s'ensuit une absorption de la volonté individuelle et de la volonté égoïque par le dessein de la Monade, qui est le dessein, constant et inaltérable, de Celui en qui nous avons la vie, le mouvement et l'être. C'est le domaine de la véritable destruction par le feu, car notre "Dieu est un Feu dévorant". C'est le buisson ardent ou arbre de vie ardent du symbolisme biblique. Les effets de ce feu, supérieur à tous, de ce terrain ardent profondément spirituel et jusque là rarement reconnu, sont résumés dans la phrase suivante de la Règle I. [32]

3. La lumière claire et froide rayonne ; elle est froide et pourtant la chaleur – suscitée par l'amour de groupe – permet à la chaleur dynamique de s'extérioriser.

Ces mots recèlent la clé de l'initiation de groupe. La lumière des initiations supérieures peut affluer quand elle est évoquée par l'amour de groupe. Cette lumière est claire et froide, mais elle produit la nécessaire "chaleur", terme symbolique employé dans de nombreuses Écritures mondiales pour exprimer l'énergie spirituelle, vivante. Je dis "énergie spirituelle" et non force de l'âme ; il y a là une distinction qu'il vous faudra un jour saisir.

Cet amour de groupe est basé sur l'aspect égoïque de la volonté que nous nommons "amour-sacrifice". Cela n'implique pas d'heureuses relations entre les membres du groupe. Il est probable que cela conduise à des échanges superficiels et extérieurs pénibles, mais fondamentalement, cela conduit à une loyauté inaltérable sous-jacente à la vie extérieure. L'influence du Maître, qui cherche à aider son disciple, produit toujours un bouleversement transitoire, transitoire du point de vue de l'âme, mais souvent consternant du point de vue de la personnalité. De même, la projection de la vie et de l'influence d'un disciple ancien dans la périphérie, ou aura, de l'aspirant ou disciple moins avancé provoque aussi – à ce niveau – perturbation et bouleversement. C'est un point qu'il faut garder soigneusement à l'esprit, tant en ce qui concerne les réactions et l'instruction du disciple, qu'en ce qui concerne l'effet qu'il peut susciter dans la vie du disciple en probation se trouvant au sein de sa sphère d'influence. Cette intrusion d'influences et ses effets subséquents, produits sur l'individu ou le groupe par un Maître ou un disciple ancien, sont habituellement interprétés en termes de personnalité et très peu compris. Ce sont, néanmoins, des aspects de la volonté supérieure de quelque disciple plus avancé martelant la volonté personnelle et évoquant la volonté-sacrifice de l'Égo, d'où une période de malaise temporaire. L'aspirant et le disciple inexpérimenté sont irrités et imputent leur malaise aux sources d'évocation, au lieu d'apprendre la nécessaire leçon consistant à recevoir et manier la force.

Néanmoins, là où l'amour véritable existe, il se produira un amoindrissement de la volonté de la personnalité, l'évocation de la volonté égoïque de sacrifice, et une capacité toujours croissante d'identification [33] du groupe avec la volonté ou dessein de la Monade. Le groupe progresse donc d'un terrain ardent à un autre, chaque terrain ardent devenant plus froid et plus clair que le précédent, mais engendrant successivement le feu brûlant, le feu à lumière claire et froide, et le feu dévorant divin.

La vérité se révèle ainsi en paraboles ; progressivement, l'initié comprend l'utilisation de la flamme, de la chaleur, de la lumière et de l'énergie ; il finit par comprendre la volonté personnelle, la volonté-sacrifice et le dessein de Shamballa, et seul l'amour, (l'amour personnel, l'amour de groupe, et finalement l'amour divin) peut révéler la signification de ces termes symboliques et des paradoxes occultes que rencontre le vrai aspirant, lorsqu'il s'efforce de fouler la Voie.

Alors que nous continuons d'étudier les règles à observer par ceux qui reçoivent l'entraînement d'initié, je voudrais vous rappeler certaines choses dont j'ai déjà parlé, mais sur lesquelles il faut insister de nouveau. L'utilité que ces Règles peuvent avoir pour vous dépendra de votre compréhension de certaines idées de base ; à vous ensuite de les faire passer dans les faits, dans toute la mesure où vous le pourrez.

Tout d'abord, je souhaite attirer votre attention sur ce que devrait être l'attitude fondamentale du candidat initié : Elle devrait être faite de dessein, gouverné par la raison pure et se manifestant en activité spirituelle. Il est facile d'écrire cette phrase, mais qu'exprime-t-elle pour vous, spécifiquement ? Permettez-moi de la développer quelque peu. L'attitude de l'initié à l'instruction devrait être celle du motif spirituel juste, ce motif étant l'accomplissement intelligent de l'aspect volonté de la divinité, ou de la Monade. Ceci implique la fusion de la volonté de la personnalité avec la volonté-sacrifice de l'âme ; une fois réalisée, elle conduit à la révélation de la Volonté divine. Nul ne peut avoir la moindre conception de cette Volonté, à moins d'être un initié. En second lieu, cette phrase suppose la libération de la faculté de perception spirituelle et de compréhension intuitive, impliquant la suppression de l'activité du mental inférieur concret, du soi personnel inférieur, et la subordination de l'aspect connaissance de l'âme à la lumière pure et claire de la [34] compréhension divine. Quand ces deux facteurs commencent à devenir actifs, apparaît la vraie activité spirituelle sur le plan physique, trouvant son motif dans la source élevée qu'est la Monade, et sa mise en œuvre dans la raison pure de l'intuition.

Vous verrez donc que ces facultés spirituelles supérieures ne peuvent intervenir que lorsque l'antahkarana commence à jouer son rôle. C'est pourquoi j'enseigne la construction du pont arc-en-ciel.

En réalité, ces Règles sont de grandes formules d'approche, mais elles indiquent que l'on aborde une section spécifique du Sentier et non l'Initiateur. Je souhaite que vous réfléchissiez à cette distinction. La "Voie de l'Évolution supérieure" s'ouvre à l'aspirant aux Mystères Majeurs, mais il est souvent désorienté au début et, dans son mental, il s'interroge fréquemment sur la différence entre le progrès ou évolution de la personnalité vers la conscience de l'âme, et la nature du progrès qui l'attend et qui est essentiellement différent du développement de la pure conscience. Aviez-vous saisi le fait qu'après la troisième initiation, l'initié ne s'occupe plus du tout de conscience, mais de fusion de sa volonté individuelle avec la volonté divine ? Il ne s'occupe pas alors d'accroître sa sensibilité au contact, ou sa réceptivité consciente aux conditions environnantes, mais il perçoit de plus en plus la dynamique de la science du Service du Plan. Cette réalisation particulière ne peut survenir que lorsque la fusion de sa personnalité et de la volonté exprimée par l'âme a disparu dans la lumière éclatante du Dessein divin – dessein que rien ne peut faire échouer, même s'il est parfois retardé comme il l'a été depuis cinquante-cinq ans. (Écrit en février 1943).

Une grande partie de ce que je viens de dire vous semblera dépourvu de sens, car le contact parfait entre âme et personnalité n'a pas été obtenu, et l'aspect volonté dans la manifestation n'est pas compris dans ses trois phases : personnelle, égoïque et monadique. Mais, comme je vous l'ai dit précédemment, j'écris pour les disciples et les initiés qui entrent actuellement en incarnation et qui seront dans toute la fleur de [35] leur conscience et de leur service à la fin de ce siècle. Mais l'effort que vous faites pour comprendre produira son effet, même si le cerveau ne l'enregistre pas.

En dernière analyse ces règles ou formules d'approche se rapportent de façon primordiale à l'aspect de Shamballa ou aspect vie. Ce sont les seules formules, ou techniques incarnées, existant actuellement qui aient la possibilité de permettre à l'aspirant de comprendre et finalement d'exprimer la signification des paroles du Christ, "La vie plus abondante". Ces paroles se rapportent au contact avec Shamballa ; le résultat en sera l'expression de l'aspect volonté. Tout le processus d'invocation et d'évocation est lié à cette idée. L'aspect inférieur est toujours le facteur d'invocation, c'est une loi inaltérable, sous-jacente à tout le processus évolutif. C'est nécessairement un processus réciproque, mais dans le temps et l'espace on pourrait dire que, généralement, l'inférieur invoque toujours le supérieur, et que les facteurs supérieurs sont alors évoqués et répondent dans la mesure de la compréhension et de la tension dynamique dont fait preuve l'élément invocatoire. Beaucoup de personnes ne le comprennent pas. On ne travaille pas au processus d'évocation. Ce terme exprime simplement la réponse de ce qui a été atteint. La tâche de l'aspect mineur, ou groupe, est invocatoire et la réussite du rite d'invocation est appelée évocation.

Donc, quand votre vie sera fondamentalement invocatoire, l'évocation de la volonté surviendra. Elle ne peut être vraiment invocatoire que lorsque personnalité et âme sont fusionnées et fonctionnent en tant qu'unité consciente, fondue et focalisée.

Le point que je souhaite maintenant clarifier est que ces formules d'approche ou règles concernent le développement de la conscience de groupe, car jusqu'ici c'est uniquement en formation de groupe que l'on peut capter la force de volonté de Shamballa. Elles sont inutiles pour l'individu, dans la nouvelle dispensation initiatique. Seul le groupe, selon le nouveau mode de travail prévu et d'initiation de groupe, peut invoquer Shamballa. C'est pourquoi Hitler, représentant la réaction contraire à Shamballa (donc la réaction mauvaise), dut assembler autour de lui [36] un groupe d'hommes, ou personnalités, ayant la même mentalité. Sur l'arc supérieur du cycle d'évocation (Hitler étant l'expression de l'arc invocatoire de la force de Shamballa), il faut un groupe pour obtenir l'évocation.

Nous en arrivons maintenant au troisième point relatif à ces règles ou formules, et à leur objectif. Elles concernent – par-dessus tout – l'initiation de groupe. Elles ont d'autres applications, mais, pour l'instant, c'est là leur utilité. Vous pourriez demander qu'est-ce que l'initiation de groupe ? Implique-t-elle que tous les membres du groupe prennent l'initiation ? Une seule personne peut-elle avoir une influence si étendue qu'elle puisse retarder ou même empêcher (dans le temps et l'espace) l'initiation de groupe ? Il n'est pas nécessaire que les membres du groupe aient tous pris la même initiation. Par là, je veux dire qu'il n'est pas exigé que tous les membres, ensemble, prennent l'initiation nécessaire à l'accession au même développement de groupe. Fondamentalement, ce que je m'efforce de communiquer au sujet de ces règles se rapporte à la troisième initiation, l'initiation de la personnalité intégrée. Cependant, elles ont forcément une correspondance avec la deuxième initiation et sont donc d'intérêt plus général, car c'est cette initiation que doivent affronter tant d'aspirants aujourd'hui, initiation prouvant que la formidable nature émotionnelle est dominée.

Je vous demande de réfléchir beaucoup à ce point-là. L'initiation de groupe signifie que la majorité des membres est bien orientée ; que les membres se proposent d'accepter la discipline qui les préparera à la prochaine grande expansion de conscience, et qu'il est impossible de détourner aucun d'eux de leur dessein (notez ce terme avec ses implications de premier rayon ou de Shamballa), quoi qu'il arrive dans leur entourage ou dans leur vie personnelle. Il vous faut y réfléchir si vous désirez faire les progrès nécessaires.

Dans ces brèves instructions dont le seul but est un "essai d'indication" (notez cette expression) il n'est pas nécessaire d'entrer dans plus de détails. De toutes façons, si l'intuition ne rend pas claires dans votre mental ces formules ou règles, tout ce que je pourrais dire ne ferait qu'entraver et contrecarrer mon dessein.

Finalement, ces formules ou règles peuvent être appliquées et [37] interprétées de trois manières, et je souhaite que vous vous en souveniez ; vous pourrez ainsi découvrir quel est votre point focal individuel d'attention et donc si vous fonctionnez en tant que personnalité intégrée. Rappelez-vous toujours que seule une personnalité intégrée peut parvenir à la nécessaire focalisation de l'âme. Ceci est une condition fondamentale. Ces trois formes d'application sont de nature physique, émotionnelle et mentale. Ces mots, dans leur signification la plus simple, se rapportent véritablement à la tâche consistant à atteindre l'une ou l'autre des initiations supérieures. La seule manière dont leur signification puisse vraiment se faire jour est de saisir les points suivants :

1. L'application physique se rapporte à l'usage que fait le groupe de la connaissance donnée et des informations perçues intuitivement, afin de satisfaire constructivement aux besoins du groupe plus vaste dont ce groupe fait partie. La consommation de cet idéal se voit dans l'activité de la Hiérarchie qui, de point de progrès en point de progrès, se trouve jouer le rôle d'interprète intuitif et de transmetteur de force entre le centre de Shamballa et l'humanité. L'initié sur la voie de l'une ou l'autre des initiations supérieures doit, à son niveau mineur, parvenir à la même fonction double et se rendre ainsi capable d'une plus large coopération.

2. L'application émotionnelle se rapporte précisément au monde de l'âme, interprété dans le sens de groupe. Actuellement, les aspirants bien intentionnés se contentent d'interpréter les conditions et les événements de leur personnalité en termes de leur signification réelle. Mais cela demeure encore une réaction individuelle. L'aspirant qui cherche à comprendre ces règles s'intéresse davantage à l'examen des situations qu'il rencontre, sous l'angle du monde dans son ensemble, et à en rechercher le sens en termes de signification de groupe. Cela sert à le décentraliser et à communiquer à sa conscience quelque aspect du "tout" plus vaste ; cela, à son tour, contribue à l'expansion de conscience de l'humanité dans son ensemble. [38]

3. L'application mentale doit être saisie et envisagée en termes de "grande lumière". Il faut se souvenir que le mental est un organe d'illumination. Donc, on pourrait se demander si l'unité des processus mentaux du groupe, considérés comme un tout, tend à jeter la lumière sur les situations et problèmes humains. Dans quelle mesure la lumière du membre du groupe facilite-t-elle ce processus ? Quelle quantité de lumière, vous, en tant qu'individu, enregistrez-vous et, en conséquence, quelle est votre contribution à la "plus grande lumière" ? La lumière de groupe est-elle une faible lueur tremblotante ou un soleil flamboyant ?

Voilà quelques-unes des implications contenues dans l'emploi de ces termes familiers ; un examen sérieux de leur sens pourrait engendrer une nette expansion de conscience. Cette expansion s'effectue normalement en certains stades clairs et précis.

1. Une prise de conscience du but. Ce but s'exprime souvent par le mot "porte". Une porte permet d'entrer dans un lieu plus vaste que la zone où se tient le candidat à l'initiation. Cette déclaration se rapporte à la "porte de l'incarnation" par laquelle l'âme qui entre en incarnation pénètre dans la vie, limitée et circonscrite du point de vue de l'âme. La porte de l'initiation introduit "à une salle plus grande", ou sphère d'expression plus étendue.

2. L'approche, selon des règles méthodiques, imposées et éprouvées, de celui qui avance vers le but qu'il a visualisé. Cela implique la conformité avec ce qui a été expérimenté, connu et démontré par tous les initiés précédents.

3. L'arrêt, à la porte, des pas de l'initié afin de "prouver qu'il est initié" avant d'entrer.

4. L'épreuve de certains tests afin de démontrer qu'il est qualifié.

5. Puis vient le stade de pénétration, dûment soumis à des règles fixes, et comportant cependant une totale liberté d'action. Vous verrez donc pourquoi il est constamment insisté sur la nécessité de la compréhension.

Avant de poursuivre notre étude des dernières phrases de la Règle I, [39] je désire attirer votre attention sur le fait que l'initié a affronté deux épreuves majeures, décrites symboliquement par les termes : "terrain ardent" et "lumière claire et froide". C'est seulement lorsqu'il a réussi à surmonter ces épreuves qu'il peut – ou que le groupe peut (lorsqu'on envisage l'initiation de groupe) – avancer et explorer les vastes espaces de la conscience divine. L'initié est soumis à ces épreuves lorsque l'âme exerce son emprise sur la personnalité et que le feu de l'amour divin détruit les amours et les désirs de la personnalité intégrée. Deux facteurs tendent à engendrer cet état de choses : la lente progression de la conscience innée vers une maîtrise plus grande, et le développement assidu de l'"ardente aspiration" dont parle Patanjali 2[1]. Lorsque ces deux facteurs sont portés à une vivante activité, ils placent le disciple au centre du terrain ardent qui sépare l'Ange de la Présence du Gardien du Seuil. Le terrain ardent est présent au seuil de tout progrès nouveau, tant que l'on n'a pas pris la troisième initiation.

La "lumière claire et froide" est la lumière de la raison pure, celle de la perception intuitive infaillible ; sa lumière révélatrice, intensive et incessante constitue, dans ses effets, une épreuve majeure. L'initié découvre la profondeur du mal et, en même temps, il est poussé au progrès par un sens grandissant de la divinité. La lumière claire et froide révèle deux choses :

À. L'omniprésence de Dieu dans toute la nature et donc dans toute la vie de la personnalité de l'initié ou du groupe d'initiés. Les yeux se dessillent, ce qui entraîne paradoxalement "l'obscure nuit de l'âme", et l'impression d'être seul et privé de tout secours. Cela conduisit (dans le cas du Christ, par exemple) à ce moment effroyable dans le Jardin de Gethsémani, qui fut consommé sur la Croix lorsque la volonté de l'âme-personnalité se trouva en conflit avec la volonté divine de la Monade. La révélation descend sur celui qui s'efforce de se maintenir dans l' "unité isolée" (terme qu'emploie Patanjali pour désigner cette expérience [2]). Cette révélation est faite à l'initié qui, depuis des siècles, est séparé de la Réalité centrale et de toutes les implications qu'elle comporte. [40]

L'omniprésence de la divinité dans toutes les formes inonde la conscience de l'initié, et le mystère du temps, de l'espace et de l'électricité se trouve révélé. L'effet majeur de cette révélation (avant la troisième initiation) est d'amener le disciple à prendre conscience de la "grande hérésie de la séparativité", trouvant un point focal en lui-même, individu séparé, pleinement conscient, connaissant son passé, conscient maintenant de son rayon et du pouvoir qui le conditionne, centré en sa propre aspiration et cependant partie intégrante du grand tout. À partir de ce moment-là, il sait que rien n'existe hors la divinité ; il l'apprend par la révélation de la séparativité inhérente à la vie de la forme, par le processus de la "nuit obscure de l'âme" et par la suprême leçon qu'elle apporte – la signification de l'isolement et du processus de libération entraînant la fusion dans l'unité, grâce à l'émission du son, du cri, de l'invocation, symbolisée par le cri du Christ sur la Croix. Ses paroles exactes ne nous ont pas été transmises. Elles varient selon chaque rayon, mais entraînent la reconnaissance de la fusion divine, où tous les voiles de séparation sont "déchirés du haut en bas" (ainsi que l'exprime le Nouveau Testament).

B. L'omniscience du Tout divin est aussi révélée à l'initié par le moyen de la lumière claire et froide, de sorte que les phases d' "expérience isolée" (appellation occulte parfois employée), prennent fin à jamais. Je souhaite que vous compreniez, dans la mesure où votre niveau de conscience actuel vous le permet, ce que cela signifie. Jusqu'ici le disciple-initié a fonctionné en tant que dualité et en tant que fusion entre énergie de l'âme et force de la personnalité. Maintenant ces formes de vie lui apparaissent telles qu'elles sont essentiellement, et il sait que – en tant qu'énergies dirigeantes et dieux temporaires – elles n'ont plus d'emprise sur lui. Il se déplace progressivement dans un autre aspect divin, emportant avec lui tout ce qu'il a reçu pendant les ères de relation et d'identification étroites avec le troisième aspect, la forme, et avec le deuxième aspect, la conscience. Il a l'impression d'être dépouillé, abandonné et seul, lorsqu'il se rend compte que la domination de l'âme et de la forme doit aussi disparaître. C'est là que réside la [41] détresse de l'isolement et l'impression écrasante de solitude. Mais les vérités révélées par la lumière claire et froide de la raison divine ne lui laissent pas le choix. Il lui faut abandonner tout ce qui le retient loin de la Réalité Centrale, il lui faut conquérir la vie, "la vie plus abondante" ce qui constitue l'épreuve suprême du cycle de vie de la Monade incarnée ; "quand le cœur même de cette expérience pénètre dans le cœur de l'initié, ce dernier extériorise alors, par le moyen de ce cœur, la pleine expression de la vie." Tels sont les termes de l'Ancien Commentaire. Je ne vois aucune autre manière de vous présenter cette idée. L'expérience ressentie n'est reliée ni à la forme ni à la conscience, ni même à une sensibilité psychique supérieure. Elle consiste en une pure identification avec le dessein divin. Cela est rendu possible car la volonté du soi de la personnalité et la volonté éclairée de l'âme ont toutes deux été abandonnées.

4. La porte est en arrière du groupe. Devant lui s'ouvre la voie.

Notez comment ce passage renverse la présentation habituelle. Jusqu'ici, dans les livres occultes, la porte de l'initiation a toujours été présentée comme progressant en avant de l'initié. Il passe de porte en porte et pénètre dans une expérience et une expansion de conscience plus vastes. Mais dans la conscience de l'initié, après les deux premières initiations, ce n'est pas ainsi que les choses sont comprises. Il s'agit simplement d'une fidélité à la forme ancienne du symbolisme comportant ses limitations de la vérité. Je souhaite vous rappeler ici que la troisième initiation est considérée par la Hiérarchie comme la première initiation majeure, les deux premières initiations étant des initiations du Seuil. Pour la masse de l'humanité, ces deux premières initiations vont pendant très longtemps constituer des expériences initiatiques majeures mais dans la vie et la compréhension de l'âme initiée, elles ne sont pas majeures. Après avoir subi les deux initiations du Seuil, l'attitude de l'initié change. Il voit des possibilités, des facteurs et des révélations dont [42] jusque là il n'avait jamais pris conscience, et qui lui étaient totalement inconnus, même dans les moments où sa conscience était à son plus haut point.

La porte de l'initiation tient une grande place dans la conscience du néophyte ; la Voie supérieure est le facteur déterminant de la vie de l'initié du troisième degré. C'est la Transfiguration. Une gloire nouvelle inonde l'initié transfiguré, qui est libéré de toute sorte d'emprise que pourrait exercer la personnalité ou l'âme. Pour la première fois lui apparaît le but de la Voie supérieure et la possibilité d'atteindre au Nirvana (appellation que lui donnent les Orientaux), il sait qu'aucune forme ou complexe spirituel, qu'aucune attraction exercée par l'âme ou la forme, ou les deux réunies, ne peuvent avoir le moindre effet sur le fait qu'il atteindra sa destination finale.

Je voudrais ici m'étendre un moment sur le symbolisme de la porte alors que l'initié commence à saisir la signification intérieure de ces simples mots. Pendant longtemps, on a rendu familiers l'enseignement donné dans la claire lumière froide au sujet de la porte, et l'accent mis sur la présentation de la porte en avant de l'aspirant, mais il s'agissait des aspects inférieurs du symbolisme, même si les aspirants ne s'en rendaient pas compte. On leur a enseigné le fait de la lumière dans la tête, qui est la correspondance, dans la personnalité, de la claire lumière froide dont je parle. Comme beaucoup d'aspirants le savent théoriquement ou effectivement par une expérience intermittente, au centre de cette lumière se trouve un point indigo foncé, bleu nuit. Notez la signification de ceci par rapport à ce que j'ai dit concernant la "nuit obscure", l'heure de minuit, l'heure zéro de la vie de l'âme. Ce point central, en réalité, est une ouverture, ou porte conduisant quelque part, une voie d'évasion, une sortie par où peut passer l'âme emprisonnée dans le corps, pour se dégager et parvenir, débarrassée des limitations de la forme, à des états de conscience plus élevés. Il a aussi été appelé "le conduit ou canal du son" ou la trompette par laquelle le A.U.M. peut s'échapper. L'aptitude à utiliser cette porte ou ce canal s'obtient par la pratique de l'alignement ; d'où l'accent mis sur cet exercice dans le but d'entraîner aspirants et disciples.

Lorsque l'alignement sera obtenu, on comprendra (se souvenant du [43] symbolisme de la tête, de la lumière et de l'ouverture centrale) que de nombreuses occasions surviennent dans la méditation où "la porte est en arrière du groupe, devant lui s'ouvre la Voie". Ceci est la correspondance inférieure de l'expérience supérieure de l'initié, dont traite notre règle.

De nouveau, cette fois par rapport à l'âme, se répète la découverte de la porte, de son usage et finalement de son apparition derrière l'initié. Cette fois, il faut trouver la porte sur le plan mental, et non comme auparavant sur le plan éthérique ; on y parvient avec l'aide de l'âme et du mental inférieur et grâce au pouvoir révélateur de la claire lumière froide de la raison. Lorsqu'il la découvre, l'initié se trouve face à la "révélation d'une expérience terrible, mais belle". Il s'aperçoit cette fois que ce n'est pas l'alignement qu'il lui faut, mais la mise en route d'un travail créateur précis – la construction d'un pont entre la porte qui se trouve derrière, et la porte qui se situe en avant. Ceci implique la construction de ce que l'on nomme techniquement, l'antahkarana, le pont arc-en-ciel. Il est construit par le disciple à l'instruction, sur la base de son expérience passée ; il est ancré dans le passé et fermement enraciné dans l'aspect le plus élevé, correctement orienté, de la personnalité. Lorsque le disciple se met à travailler de manière créatrice, il s'aperçoit qu'il y a une action réciproque de la Présence, la Monade, l'unité qui se tient derrière la porte. Il découvre qu'une arche du pont (si on peut l'appeler ainsi) est construite ou projetée, à partir de l'autre rive du gouffre le séparant de l'expérience de la vie de la Triade spirituelle. Pour l'initié, cette Triade spirituelle est essentiellement ce que la personnalité triple est à l'homme en incarnation physique.

Je me demande si j'ai réussi à vous donner au moins une idée des possibilités qui s'offrent au disciple, et si je vous ai incités à une réceptivité consciente et précise face à ces possibilités. Je ne peux pas éviter de parler en termes de conscience, bien que la vie de la Triade – conduisant à son tour à l'identification avec la Monade comme la vie de la personnalité conduit finalement à l'expression et à la domination de l'âme – n'ait rien à voir avec la conscience ou la sensibilité, tels que ces [44] termes sont généralement compris. Cependant, rappelez-vous comment, dans tous mes enseignements sur le développement occulte, j'ai utilisé le terme IDENTIFICATION. C'est le seul mot que j'ai trouvé qui puisse, en quelque manière, exprimer l'unité complète qui est finalement accomplie par ceux qui développent le sens de l'unité et refusent d'accepter l'isolement ; la séparativité disparaît alors complètement. L'isolement dans l'unité qui est accompli est l'unité avec le tout, avec l'Existence dans sa totalité, ce qui n'a pas encore beaucoup de sens pour vous.

5. Qu'ensemble et en groupe, les frères s'avancent, qu'ils sortent du feu, entrent dans le froid, et se dirigent vers un nouveau point de tension.

Certaines instructions fondamentales sont données là sous une forme très brève. Chacune d'elles indique les attitudes nouvelles qui sont imposées à tous ceux qui ont pris l'initiation. Elles ne peuvent pas être interprétées en termes de Sentier du Disciple ou de Sentier de Probation. La signification ordinaire, à laquelle on parvient aisément, a peu de sens pour le mental initié. Permettez-moi de l'examiner brièvement, afin que règne la clarté de conception, sinon de détail.

a. Ils sortent du feu. Ceci est une manière symbolique d'indiquer que la vie de la personnalité est délibérément abandonnée. C'est cette expression qui donne la clé de l'initiation à laquelle cette règle se rapporte. Chacune de ces règles contient la clé de l'initiation particulière à laquelle elle se rapporte. Les règles ne sont pas placées dans leur ordre exact, en une succession se rapportant aux sept initiations. L'aspirant doit invoquer son intuition s'il veut parvenir à une connaissance exacte. J'indiquerai parfois l'initiation dont il s'agit, mais pas toujours, car ce serait sans intérêt. La clé de la septième initiation qui attend des Êtres aussi élevés que le Christ ne vous servirait à rien du tout. La clé de l'initiation de la Transfiguration peut être importante, car elle implique la personnalité, et beaucoup d'entre vous, dans un avenir pas tellement éloigné (du point de vue du cycle de vie de l'âme, s'étendant sur des éons) devront y faire face. Le secret de la troisième initiation est la manifestation d'une liberté complète vis-à-vis des demandes ou exigences de la personnalité. Elle n'implique pas l'expression [45] absolument parfaite de la vie spirituelle, mais indique que le service de l'initié et son comportement dans la vie – envisagés de manière large et générale, sous l'angle de la tendance de la vie et de la consécration à l'humanité – ne sont plus influencés par les limitations du soi personnel inférieur qui existent encore.

b. Ils entrent dans le froid. Cela signifie que le point focal de la vie est maintenant dans le domaine de la claire vérité et de la raison pure. La vie de l'initié se déplace rapidement du centre égoïque, véhicule de l'âme, au niveau de la vie ou de l'état d'existence bouddhique. Notez bien que je n'ai pas dit état "de conscience". Ce niveau est sans forme, mais conserve les fruits de l'expérience dans la forme. Il est orienté vers une unité et une identification de fait avec l'aspect vie de la divinité, mais conserve sa propre identité, reconnue et parachevée. Le groupe se maintient à ce niveau de pure impersonnalité et de juste orientation, obéissant à la règle qui gouverne ce stade particulier de développement.

c. Ils se dirigent vers un nouveau point de tension. L'interprétation de cette phrase est difficile. Cela est dû à l'impression fausse donnée par le mot "tension" à l'heure actuelle. Dans l'esprit du lecteur, il est associé à l'idée de nerfs, de points de crise, de courage et de fatigue. N'en est-il pas ainsi ? Mais en réalité, la tension, au sens occulte, n'est nullement associée à ces aspects de la réaction de la personnalité. La signification ésotérique de la tension est (dans la mesure où je peux l'expliquer par des mots limitatifs) "la Volonté immuable focalisée". Une tension correcte suppose l'identification du cerveau et de l'âme avec l'aspect volonté, et le maintien de cette identification immuable quelles que soient les circonstances et les difficultés.

Vous pouvez donc voir à quel point cet enseignement est plus avancé que les attitudes et les buts actuels. L'identification avec l'âme et avec la Hiérarchie dépend de l'aptitude du disciple à aimer correctement. C'est l'apparition du deuxième aspect divin, car l'amour est l'expression [46] de la vie de groupe, ce qui se rencontre très rarement aujourd'hui. La tension correcte indique l'apparition du premier aspect, celui de la volonté, et cela se rencontre encore rarement, sauf chez les membres initiés et disciples les plus avancés de la Hiérarchie.

L'amour gouverne la voie conduisant à la Hiérarchie et c'est la base de toute approche, de toute appréciation ou acceptation de la vérité.

La volonté gouverne la voie conduisant à Shamballa et c'est la base de toute approche, de toute appréciation de l'Existence et de toute identification avec elle.

Cette volonté qui se révèle s'exprime en tension, au sens ésotérique. Elle incarne les idées d'orientation, de détermination implacable, de faculté d'attendre en maintenant l'intention et l'orientation insensibles à tout ce qui peut se produire. Elle implique aussi la détermination d'exécuter l'action prévue (toujours de nature créatrice et basée sur la compréhension aimante) au moment psychologique ou moment précis que l'âme ou psyché a déterminé comme correct. Vous avez là un des transferts intéressants de la signification et de la relation qui surviennent dans la Sagesse Immémoriale. Le Fils ou âme vient en manifestation avec l'aide de la Mère ou aspect matière. Ceci est pour vous une vérité très familière. Dans le stade suivant, celui du développement de l'initié, le Fils, à son tour, devient l'aspect féminin ou négatif et, se manifestant en tant que psyché, permet à l'initié de susciter l'expression d'un autre aspect divin, celui de la volonté. Tant que la quatrième initiation n'est pas prise, c'est "l'âme en tant que point focal de la lumière descendante et du rayonnement ascendant". Cette activité double révèle la nature de la volonté. Notez comment cette expression, tirée d'Écritures anciennes, décrit l'antahkarana.

Il n'est pas possible dans ces brèves instructions de traiter suffisamment de l'aspect volonté de la divinité, et cela serait sans intérêt à l'heure actuelle. Les aspirants doivent apprendre la nature de la volonté par le pouvoir de l'illumination intérieure et par certaines reconnaissances intelligentes. Ils apprennent la nature du soi à l'aide de la personnalité qui est l'ombre ou la distorsion de la volonté divine. Ils passent d'une [47] expression de la volonté qui est purement égoïste, se suffit à elle-même, est centrée sur soi, à la compréhension de la volonté de groupe et à l'effort pour incarner cette volonté de groupe. Cette volonté de groupe se rapporte toujours à ce qui n'est pas la volonté du soi séparé.

Lorsque grandit cette faculté, l'aspirant atteint un point où il envisage la vie de groupe et le bien du groupe comme parties intégrantes d'un bien plus grand Tout. Ce plus grand Tout est la vie même, séparée de la forme mais agissant toujours par la forme quand elle est en manifestation, et agissant selon un dessein prévu. L'aspirant s'aperçoit alors de plus en plus que l'intelligence et l'amour ne suffisent pas, mais qu'ils doivent être complétés et mis en œuvre par la volonté, qui est le dessein intelligent et actif, appliqué avec amour.

La difficulté de cette question est inhérente au fait qu'à la base (si étrange que cela puisse paraître) l'amour est la ligne de moindre résistance pour l'être humain développé. C'est le principe qui gouverne l'actuel système solaire. La volonté sera le principe qui gouvernera le prochain système solaire, lequel sera amené en manifestation par l'intermédiaire des êtres humains qui – dans notre système solaire – seront parvenus à la pleine expression de l'aspect volonté. Alors, dans la prochaine manifestation d'achèvement parfait, l'amour sera à l'aspect volonté, ce que l'intelligence est à l'amour dans notre système solaire.

 

[1] La Lumière de l'Âme (Livre II, Sutra 1), page anglaise 119.

[2] La Lumière de l'Âme (Livre IV, Sutras 25, 34), pages anglaises 420, 428.