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CHAPITRE VI LE PROBLEME DE L’UNITE INTERNATIONALE

LE PROBLEME DE L'UNITE INTERNATIONALE

Je voulais, à l'origine, discuter huit problèmes. Toutefois, j'ai décidé de combiner les deux derniers pour les traiter ensemble, vu leur interdépendance. La distribution des ressources mondiales et l'organisation stable de l'unité des peuples reviennent en réalité au même, car, au fond, toutes les guerres modernes partent d'un problème économique. Celui-ci résolu, les guerres cesseront en grande partie. En étudiant donc la sauvegarde de la paix, dont les Nations Unies font leur problème et leur principale préoccupation, il apparaît immédiatement que la paix, la sécurité et la stabilité du monde sont primordialement liées au problème économique. La délivrance de la misère ferait disparaître une des causes majeures de guerre. Là où les richesses du monde sont inégalement distribuées et dans une situation où certaines nations possèdent, ou prennent tout, alors que d'autres manquent des premières nécessités, il est évident que cela constitue un facteur de troubles, auquel il faut remédier. Je vais donc traiter de cette unité et de cette paix mondiales, surtout du point de vue du problème économique.

Avant de commencer, toutefois, je voudrais m'occuper du problème des problèmes même, et de mon intention en écrivant à leur sujet. On a dit ; que, de l'enseignement de la bonne volonté et d'une compréhension pleine d'amour, j'avais récemment passé à un autre thème et à une attitude différente, pour m'occuper maintenant d'une critique à l'échelle mondiale dans les pages de cet ouvrage. On prétend aussi que, de maître spirituel, auteur de nombreux livres d'une profonde qualité spirituelle, je devenais maintenant un écrivain politique et [182] m'occupais des problèmes du monde, au lieu de questions spirituelles, mystiques ou occultes.

J'admets la validité de ces deux affirmations et m'en félicite. J'écris en effet maintenant sur les affaires mondiales pour montrer ce qui doit être détruit ou changé, avant que l'Ère nouvelle, avec sa civilisation nouvelle, sa culture nouvelle, sa nouvelle religion mondiale et ses nouvelles méthodes d'éducation, puisse vraiment débuter. Mes livres ont toujours traité de ces choses nouvelles et j'ai toujours donné la note dominante de l'Ère nouvelle.

DE JUSTES RELATIONS HUMAINES

Au cours des vingt années précédant la dernière guerre mondiale, j'ai donné l'enseignement spirituel et ésotérique nouveau. Puis vinrent les sept ans de guerre, aboutissement de la vieille civilisation. J'ai fait remarquer que cette guerre était le résultat de stupidités, de politiques à courtes vues, des erreurs et de l'égoïsme de l'humanité même, et en outre de siècles de mauvaises relations humaines, entre individus, communes, nationales et internationales. La cessation des combats fournit l'occasion d'inaugurer un mode de vie nouveau et meilleur et d'établir la sécurité et la paix, après lesquelles tous les hommes soupirent. Trois groupes ont immédiatement surgi dans le monde :

1. Les groupes puissants, réactionnaires et conservateurs, désireux de préserver autant du passé que possible, doués d'un grand pouvoir, mais sans vision.

2. Les idéologistes fanatiques de chaque pays, communistes, démocrates et fascistes.

3. Les masses inertes du peuple de tout pays, ignorantes en grande partie, ne désirant que la paix après la tempête et la sécurité au lieu du désastre économique. Elles sont victimes de ceux qui les régissent, à cause des anciennes coutumes établies et on leur cache la vérité sur la situation mondiale.

Tous ces groupes exercent à présent leur influence. Les groupes réactionnaires, parce que l'argent leur donne le pouvoir, ou qu'ils ont de hauts postes dans le gouvernement. Les idéologistes, parce qu'ils répondent aux exigences de genres d'esprits différents, qui voient la nécessité du changement et [183] croient qu'une idéologie imposée pourrait l'effectuer. Les masses rudimentaires, par la force croissante de la misère qu'elles subissent et leur éveil graduel au véritable état des choses. Tous ces facteurs produisent les désordres actuels et conditionnent les délibérations des Nations Unies. Sans qu'il y ait de guerre "chaude", il n'y a point de paix, point de sécurité et nul espoir immédiat de l'une, ni de l'autre.

Il est essentiel, pour le bonheur futur et le progrès de l'humanité, que les mauvaises mœurs anciennes ne reviennent point, ni en politique, ni dans la religion, ni dans l'économie. En traitant ces problèmes, j'ai donc essayé d'indiquer les conditions fâcheuses qui ont amené l'humanité à sa présente condition de désastre cataclysmique. Ces conditions résultent, je l'ai dit, des fois religieuses, dont les idées n'ont pas avancé depuis des siècles ; de systèmes économiques qui insistent sur l'accumulation des richesses et biens matériels, en abandonnant tout le pouvoir et les produits de la terre entre les mains de relativement peu d'hommes, tandis que le reste de l'humanité lutte pour subsister à grand-peine ; enfin de régimes politiques livrés à des gens corrompus, totalitaires, spéculateurs et qui préfèrent les places et le pouvoir à leurs semblables.

Il est essentiel que ces choses-là soient présentées en termes du bien spirituel de l'humanité, et selon une interprétation plus juste du terme "spirituel". Le temps est passé depuis longtemps (ou devrait l'être) où une ligne de démarcation pouvait s'établir entre le monde religieux et celui de la politique ou de l'économie. La raison de la politique corrompue et des combinaisons ambitieuses et accapareuses de tant de chefs dans le monde se trouve dans le fait que les hommes et les femmes de mentalité spirituelle n'ont pas brigué, comme l'exigeaient leur devoir spirituel et leur responsabilité, la conduite du peuple. Ils ont abandonné le pouvoir à des mains indignes et permis aux égoïstes et aux indésirables d'être chefs.

Le mot "spirituel" n'appartient pas aux Églises et aux religions. "La religion pure et sans tache" est pure charité et imitation sans égoïsme du Christ. Comme je l'ai montré au chapitre VI, les Églises elles-mêmes constituent de vastes systèmes capitalistes ; surtout l'Église catholique, et manifestent fort peu l'esprit qui animait le Christ. Les Églises ont eu leur chance, mais elles ont peu fait pour changer les cœurs des hommes, ou pour le bien du peuple. Selon la loi cyclique, les idéologies politiques et les plans nationaux ou internationaux retiennent maintenant l'attention des peuples et, partout, [184] des efforts sont tentés pour amener de meilleures relations humaines. Aux yeux des gens spirituels et des philanthropes éclairés, c'est un signe de progrès et l'indication sublime de la divinité innée en l'homme. Est vraiment spirituel, ce qui relie correctement l'homme à l'homme et l'homme à Dieu et démontre en un monde meilleur l'expression des Quatre Libertés pour la planète entière. Dans ce but doit s'activer l'homme vraiment spirituel.

Je ne m'intéresse pas à aider ou à instruire ceux qui séparent les affaires du monde et de l'humanité de l'enseignement spirituel et d'une vie désintéressée. Je ne sais que faire de visionnaires mystiques ou d'ésotéristes aimant à errer dans les régions supérieures de la pensée abstraite, et qui amassent des renseignements occultes ou mystiques, en refusant de comprendre que le changement de l'ordre ancien, l'éveil de l'humanité à de nouvelles possibilités et la purification de l'arène politique et économique constituent aujourd'hui les facteurs de la plus haute valeur spirituelle. Est spirituel ce qui a pour motif l'établissement du Royaume de Dieu sur la terre. Cela ne peut se produire avant que bien des changements aient été effectués dans la vie et les affaires humaines.

Le Royaume de Dieu inaugurera un monde qui veut être uni, où l'on comprendra que, politiquement, l'humanité, dans son ensemble, a bien plus d'importance qu'une seule nation. Ce sera un nouvel ordre mondial, édifié sur des principes différents de ceux du passé et où les hommes feront agir la vision spirituelle dans leurs gouvernements, dans leurs plans économiques et dans toutes les mesures destinées à assurer la sécurité et les justes relations humaines. Qu'il me soit permis de répéter encore : La spiritualité consiste essentiellement à établir de justes relations humaines, à promouvoir la bonne volonté et enfin à établir la paix véritable sur la terre, comme résultat de ces deux expressions de la divinité.

Le monde aujourd'hui est plein de voix contradictoires. Partout, on proteste contre les conditions mondiales ; tout est mis en lumière ; les injures sont criées du haut des toits, comme le Christ a prophétisé qu'elles le seraient. La raison de tous ces cris, toutes ces disputes et ces critiques bruyantes est que les hommes, en prenant conscience des faits, se sont mis à réfléchir et à élaborer des plans, ils sont conscients de la culpabilité existant en eux. Leur conscience les inquiète ; ils constatent l'inégalité des chances, les graves abus, les distinctions invétérées entre les hommes, les discriminations raciales et [185] nationales. Ils remettent en question leurs buts individuels, aussi bien que les plans nationaux. Les masses humaines, partout commencent à comprendre qu'elles sont pour une large part responsables de ce qui ne va pas, et que leur inertie, faute d'action correcte et de pensée juste, les a conduits au fâcheux état de choses actuel du monde. Ce que j'ai à dire constitue donc un défi et jamais un défi n'est tout à fait bien reçu.

Cet éveil des masses et la détermination des forces réactionnaires et des intérêts financiers de conserver l'ancien et de combattre le nouveau sont en bonne partie responsables de l'actuelle crise mondiale. La lutte entre les forces anciennes, bien retranchées, et le nouvel idéalisme qui émerge constitue le problème d'aujourd'hui. D'autres facteurs, si importants soient-ils individuellement ou nationalement, sont relativement négligeables du point de vue véritablement spirituel.

L'unité, la paix et la sécurité des nations, grandes et petites, ne sauraient être atteintes en obéissant aux injonctions de l'avide capitaliste ou des ambitieux de n'importe quel pays et pourtant, dans bien des circonstances, leurs avis sont acceptés. Elles ne se laisseront point gagner par l'influence de n'importe quelle idéologie, si bonne apparaisse-t-elle à ceux qui sont conditionnés par elle. Pourtant, il en est qui cherchent à imposer leur idéologie au monde, et je ne me réfère pas à la seule Russie. On ne les atteint pas en demeurant assis et en laissant le soin de changer les conditions à Dieu ou au processus de l'évolution. Pourtant, il en est qui ne font rien pour aider, même en connaissant bien les conditions dans lesquelles doivent agir les Nations Unies.

L'Unité, la paix et la sécurité viendront grâce à une prise de conscience intelligente des maux qui ont amené la situation actuelle du monde, suivie de démarches avisées, pleines de compréhension et de compassion, qui amèneront l'établissement des justes relations humaines, la substitution de la collaboration au système de rivalités actuelles et l'éducation des masses de chaque pays sur la nature de la vraie bonne volonté et de sa puissance jusqu'ici inemployée. Cela entraînera au profit de méthodes d'éducation correctes, le détournement d'innombrables millions d'argent qui ne seront plus utilisés par les forces guerrières pour être convertis en armées, marines et armements.

Voilà ce qui est spirituel, ce qui est important et pour quoi tous les hommes doivent lutter. La Hiérarchie spirituelle de la planète s'intéresse en premier lieu à trouver les hommes qui [186] œuvreront dans ce sens ; elle s'intéresse en premier lieu à l'humanité, réalisant que les démarches entreprises par l'humanité au cours des prochains cinquante ans conditionneront l'Ère nouvelle et détermineront la destinée de l'homme. Sera-ce un destin d'annihilation, de guerre planétaire, de famine mondiale, de pestilence, de nation s'élevant contre nation et d'effondrement complet de tout ce qui donne du prix à la vie ? Tout cela pourrait bien arriver, si des changements fondamentaux ne sont pas effectués et réalisés dans la bonne volonté et la compréhension aimante. Par ailleurs, nous pouvons avoir une période (difficile, mais utile parce qu'instructive) d'adaptation, de concessions, d'abandons. Nous pouvons avoir une période de juste reconnaissance et de chances partagées, d'un effort commun pour amener les justes relations humaines et une méthode éducative qui formera la jeunesse de toutes les nations à agir en citoyens du monde et non en propagandistes nationalistes. Ce dont nous avons surtout besoin, c'est l'abolition, résultant de la maturité spirituelle, de ces deux principes qui ont suscité tant de maux dans le monde : la Souveraineté et le Nationalisme.

LA DESUNION MONDIALE

Qu'est-ce qui, à présent, semble empêcher l'unité mondiale et faire échouer les Nations Unies dans l'établissement des mesures nécessaires si impatiemment attendues par l'homme de la rue ? La réponse n'est pas difficile à trouver et implique toutes les nations : le nationalisme, le capitalisme, la rivalité, l'avidité aveugle et stupide. C'est son intense nationalisme sentimental, qui fait de la Pologne un membre si difficile de la famille des nations ; c'est le matérialisme et la crainte, plus le manque d'intérêt pour les choses spirituelles, qui rendent la France si constamment obstructionniste et l'a conduite si longtemps à s'opposer à toute solution de la question allemande. C'est une adhésion fanatique à une idéologie et son manque de maturité nationale, qui dictent une bonne partie de l'activité russe au cours des conférences. C'est leur capitalisme effréné qui fait des États-Unis une des nations les plus redoutées, à quoi s'ajoutent ses gestes de puissance armée. C'est un impérialisme moribond qui gêne aujourd'hui la Grande-Bretagne, accrochée à des territoires et à des responsabilités, dont elle comprend qu'elle pourrait bien les transférer aux soins des Nations Unies. L'espoir de la Grande-Bretagne [187] réside dans ses tendances socialistes qui lui permettent de prendre la "voie du milieu" entre le communisme russe et le capitalisme américain. C'est l'avidité satisfaite de soi des nations ayant échappé à la guerre, qui gêne le progrès. C'est la lutte pour posséder le pétrole du monde que se livrent les trois Grandes Puissances, qui bloque la paix du monde. Ce sont les actions tortueuses des Juifs et la haine qu'ils entretiennent, qui tendent aussi à miner l'espérance de la paix. C'est l'attitude de l'Inde et de la Chine qui complique l'action des gens bien intentionnés. C'est le traitement, contraire au christianisme et à la démocratie, des populations nègres aux États- Unis et en Afrique, qui contribue à les faire fermenter. C'est l'inertie aveugle et le manque d'intérêt de la masse populaire qui permet aux mauvais chefs de détenir le pouvoir. C'est la crainte du reste du monde, qui oblige les chefs russes à maintenir leurs peuples dans l'ignorance totale de l'attitude des autres nations à propos des affaires mondiales. C'est un mauvais usage de l'argent qui colore les vues de la presse et de la radio en Grande-Bretagne et plus encore aux États-Unis, pour cacher en bonne partie la vérité au peuple. C'est le bouleversement ouvrier, partout, qui alimente la tourmente et impose des souffrances inutiles au public. C'est la profonde méfiance, politique et internationale, la propagande trompeuse et l'apathie des Églises qui compliquent encore le problème. Par-dessus tout, c'est le refus de la part du public de regarder la vie en face et de voir les faits tels qu'ils sont. La masse des hommes a besoin d'être éveillée pour exiger que les biens soient le partage de tous également et non pas uniquement d'un groupe privilégié et elle a besoin d'apprendre que "la haine ne cesse pas par la haine, mais par l'amour". Un pareil amour n'est pas sentimental, mais c'est une bonne volonté efficace, s'exprimant par les individus, dans les communautés et entre les nations.

Tel est le tableau triste et fâcheux du monde d'aujourd'hui, et seuls des aveugles et des indifférents le nieraient. Seule, une perception aiguë de la situation et des sources du mal contribueront à donner à l'humanité l'impulsion voulue pour prendre les mesures nécessaires. Mais il existe une autre face du tableau, et qui compense le mal, quoique, jusqu'à présent, elle ne l'équilibre, ni ne le vaille.

Aujourd'hui des hommes et des femmes, partout, en haute situation ou non, dans chaque nation, chaque communauté, chaque groupe, présentent la vision des justes relations [188] humaines, destinées à constituer la norme dans l'avenir, pour l'humanité. Partout ces gens là exposent les maux à éliminer et sans cesse, ils éduquent ceux qu'ils rencontrent et leur apprennent les principes de l'Ère nouvelle. C'est la masse de ces gens qui est importante. En politique, il existe de grands et sages hommes d'État qui tâchent de guider sagement leur peuple, mais ils ont encore trop à faire. Franklin D. Roosevelt en était un remarquable exemple pour notre temps. Car il fit de son mieux et mourut au service de l'humanité. Il existe des éducateurs éclairés, des écrivains et des conférenciers dans tous les pays, qui cherchent à montrer au peuple combien l'idéal est pratique, comme la bonne volonté de l'humanité est disponible, et combien il est facile d'appliquer des idéaux, lorsque les hommes et les femmes de bonne volonté sont en nombre suffisant dans le monde pour imposer les conclusions. C'est un facteur d'importance. Il y a aussi des savants, des médecins, des agriculteurs, qui ont consacré leur vie à l'amélioration de l'existence humaine. Il y a des prêtres de toutes les Églises qui suivent sincèrement les pas du Christ (mais ce n'en sont pas les chefs), et qui répudient le matérialisme qui a ruiné les Églises. Il y a des hommes et des femmes sans importance, par millions, qui voient juste, pensent clairement et travaillent dur dans leurs communautés pour établir de justes relations humaines.

La sécurité, le bonheur et des relations pacifiques sont le désir de chacun. Toutefois, avant que les Grandes Puissances, en collaboration avec les petites nations, aient résolu le problème économique et réalisé que les ressources de la terre n'appartiennent pas à une seule nation, mais à l'ensemble de l'humanité, il n'y aura point de paix. Le pétrole du monde, ses richesses minérales, le charbon, le blé, le sucre et les céréales appartiennent à tous les hommes de tous pays. Ce sont des denrées essentielles à l'existence quotidienne de l'homme de la rue.

Le véritable problème des Nations Unies est double : il implique la distribution équitable des ressources mondiales, afin d'arriver à la suppression de la misère et il implique aussi l'établissement d'une vraie égalité des chances et de l'éducation pour tous, partout. Les nations qui ont d'abondantes richesses ne sont pas propriétaires ; elles sont gardiennes des biens du monde, confiés à elles à l'intention de leurs semblables. Le temps viendra inévitablement où, dans l'intérêt de la paix et de la sécurité, les capitalistes des diverses nations [189] seront forcés de comprendre cela et de substituer le principe du partage à l'ancien principe d'une mainmise avide qui les a guidés jusqu'à présent.

Il fut un temps, il y a un siècle ou un peu davantage, où la juste distribution des richesses du monde eût été impossible. Cela n'est plus vrai aujourd'hui. Les statistiques existent. Des computations ont été faites. Des investigations ont pénétré dans tous les domaines des ressources de la terre et ces investigations, computations et statistiques sont publiées et à la disposition du public, s'il sait où les chercher. Les hommes au pouvoir, dans chaque pays, savent exactement les quantités de nourriture, de minerai, de pétrole, de charbon et d'autres articles indispensables, qui sont disponibles pour un usage à l'échelle mondiale, sur une base correcte et équitable. Mais ces biens sont mis en réserve par les nations impliquées, car ils constituent "des points à discuter et une monnaie d'échange". Le problème de la distribution n'est plus difficile, une fois que les produits alimentaires du monde sont considérés en dehors de la politique et du capitalisme. Il faut aussi se souvenir que les moyens de distribution par mer, rail ou air sont adéquats.

Rien n'arrivera, toutefois, avant que les Nations Unies se mettent à parler en termes d'humanité entière et non plus en termes de frontières, d'objectifs techniques et de craintes, ni en termes de valeur du pétrole ou du charbon comme objets de marchandages (comme pour le Proche-Orient ou l'attitude récente de la France à l'égard de l'Allemagne), ou encore en termes de méfiance et de suspicion. La Russie se méfie du capitalisme des États-Unis et, à un moindre degré, de la Grande-Bretagne. L'Amérique du Sud est en train d'adopter une méfiance croissante à l'égard des États-Unis, à cause de leur impérialisme. La Grande-Bretagne et les États-Unis se méfient tous deux de la Russie, du fait de ses paroles, de son usage du droit de veto et de son ignorance de l'idéalisme occidental.

Il faut pourtant se rappeler qu'il existe des hommes d'État en Grande- Bretagne, aux États-Unis et en Russie qui s'efforcent d'agir en faveur de l'homme de la rue et de le défendre dans les conclaves des nations. Jusqu'à présent, une opposition égoïste a rendu leur travail inutile et les intérêts financiers de bien des pays ont annulé leurs efforts. Je ne voudrais pas que vous oubliiez ces hommes. La Russie n'a pas d'intérêt financier, mais possède de vastes ressources en hommes et en armes et fait jouer celles-ci contre les intérêts [190] capitalistes. Ainsi la guerre continue et l'homme de la rue attend, sans grand espoir, une décision qui conduirait à la paix, une paix basée sur la sécurité et de justes relations humaines.

Pour compliquer encore le problème, il y a le fait que l'Est et l'Ouest considèrent la vie sous des angles différents. Le point de vue oriental est négatif et subjectif ; celui de l'Ouest est positif et scientifique, donc objectif. Je me réfère ici à l'Asie et au monde occidental. Ceci se complique encore parce que l'Europe occidentale et l'Europe orientale envisagent la vie et les problèmes modernes de points de vue totalement différents. Cela rend la coopération difficile et complique nettement le problème posé aux Nations Unies. L'Église et l'État ne sont guère d'accord ; entre le capital et le travail se poursuit une guerre constante ; l'homme de la rue paie les pots cassés et attend la justice et la liberté.

L'UNITE MONDIALE

Je n'ai point de conseil de perfection à donner au monde, ni aucune solution apportant un secours immédiat. Si je proposais pareille solution, vous pourriez à juste titre vous méfier de moi. Je puis toutefois dire qu'aux chefs spirituels de la race, certaines directives semblent justes et qu'une attitude basée sur elles, serait constructive. Énumérons-les pour vous permettre d'y réfléchir :

1. Les Nations Unies, avec leur assemblée, le Conseil de Sécurité et les Comités doivent être soutenues. Il n'existe encore aucune autre organisation à laquelle l'homme puisse s'adresser avec espoir. Il lui faut donc appuyer les Nations Unies et, en même temps, faire savoir à ce groupe de chefs du monde ce dont il a besoin.

2. Le grand public de toutes les nations doit être instruit des justes relations humaines. Par-dessus tout, les enfants et la jeunesse du monde doivent apprendre la bonne volonté envers les hommes de partout, sans égard à la race et à la croyance.

3. Il faut accorder du temps aux adaptations nécessaires et l'humanité doit apprendre à se montrer intelligemment patiente. L'humanité doit regarder avec courage et optimisme le lent processus d'édification de la nouvelle civilisation.

4. Une opinion publique intelligente et prête à collaborer doit être créée en chaque pays et l'établir constitue un important [191] devoir spirituel. Cela prendra beaucoup de temps, mais si les hommes de bonne volonté et les gens aux intérêts spirituels dans le monde s'y attellent vraiment, cela peut s'accomplir en vingt-cinq ans.

5. Le conseil économique mondial ou tout autre organisme représentant les ressources du monde, doit se libérer de la politique frauduleuse, de l'influence capitaliste avec ses combinaisons tortueuses. Il doit libérer les ressources de la terre au profit de l'humanité. Cette tâche prendra du temps, mais sera possible quand les besoins du monde seront mieux mesurés. Une opinion publique éclairée rendra les décisions du conseil économique pratiques et réalisables. Le partage et la collaboration doivent être enseignés au lieu de l'avidité et de la rivalité.

6. Liberté doit être donnée de voyager partout, en toutes directions, dans tous les pays. Ces rapports libres seront le moyen pour les membres et les branches de la famille humaine de se connaître et de s'apprécier. Les passeports et les visas doivent être supprimés, car ils sont le symbole de la grande hérésie de la séparativité.

7. Partout les hommes de bonne volonté doivent être mobilisés et mis à l'œuvre. C'est de leurs efforts que dépend le futur de l'humanité. Ils existent par millions, partout et, s'ils s'organisent et se mobilisent, ils représentent une grande partie du public qui réfléchit.

C'est par l'action régulière, consistante et organisée des hommes de bonne volonté du monde entier que l'unité du monde sera amenée. À présent, ces hommes sont seulement en voie de s'organiser et sont enclins à croire que l'œuvre à accomplir est tellement immense et les forces dressées contre eux si considérables, qu'à présent, leurs efforts isolés sont impuissants à briser la barrière d'avidité et de haine où ils se heurtent. Ils comprennent qu'il n'existe encore aucune propagande systématique du principe de bonne volonté offrant la solution du problème mondial. Ils n'ont jusqu'à présent aucune idée du nombre de ceux qui partagent leurs sentiments. Ils se posent les mêmes questions qui tourmentent partout les gens : Comment restaurer l'ordre ? Comment les ressources du monde peuvent-elles être distribuées selon la justice ? Comment les Quatre Libertés peuvent-elles devenir effectives et non demeurer du domaine des beaux rêves ? Comment la véritable religion peut- elle ressusciter, et les principes d'une existence vraiment spirituelle gouverner les cœurs [192] des hommes ? Comment une vraie prospérité peut-elle être établie et résulter en unité, paix, abondance ?

La bonne voie est unique et certains signes indiquent que, par millions, les gens s'y engagent. L'unité et les justes relations humaines – individuelles, communales, nationales et internationales – peuvent se réaliser par une action unanime des hommes et des femmes de bonne volonté de tous pays.

Ces hommes et ces femmes de bonne volonté doivent être découverts et organisés. Ainsi s'apercevront-ils de la puissance de leur nombre, car ils sont nombreux. Ils doivent former un groupe mondial, défendant les justes relations humaines et éduquant le public sur la nature et la puissance de la bonne volonté. Ils créeront ainsi à l'échelle mondiale une opinion publique si puissante et si franchement en faveur du bien-être social, que chefs, hommes d'État, politiciens, hommes d'affaires et Églises seront forcés de l'écouter et de s'y conformer. Constamment, régulièrement, le grand public doit être instruit de l'internationalisme et de l'unité mondiale, basée sur la simple bonne volonté et sur l'interdépendance dans la collaboration.

Ce n'est pas là un programme mystique ou impraticable. Il ne se réalisera pas par les procédés d'attaque, de révélations sensationnelles ou sournoises. Il met l'accent sur une politique nouvelle qui se base sur le principe d'établir de justes relations humaines. Entre les exploités et les exploiteurs, les fauteurs de guerre et les pacifiques, les masses et leurs gouvernements, ces hommes de bonne volonté groupés interviendront par millions, sans prendre parti, sans manifester d'esprit partisan, ne fomentant aucun trouble politique ou religieux, et n'attisant aucune haine. Ce ne sera pas une masse négative, mais un groupe positif, interprétant le sens des justes relations humaines, défendant l'unicité de l'humanité et une fraternité pratique et non plus théorique. La propagation de telles idées par tous les moyens disponibles et le développement du principe de bonne volonté produiront un puissant groupe international et organisé. L'opinion publique se verra forcée de reconnaître l'influence d'un tel mouvement. Enfin, l'importance numérique des hommes et femmes de bonne volonté dans le monde croîtra tant, qu'ils influenceront les événements mondiaux. Leurs voix unies se feront entendre en faveur des justes relations humaines.

Ce mouvement gagne déjà en puissance. Dans bien des pays, ce projet d'organiser un groupe de gens formés à la bonne [193] volonté, et dotés d'une claire vision des principes destinés à régir les relations humaines dans les affaires mondiales, a déjà dépassé le stade de projets. Le noyau est prêt à l'action. Ses fonctions peuvent se résumer ainsi :

1. Restaurer la confiance du monde, en lui apprenant combien de bonne volonté, organisée et non organisée, existe aujourd'hui dans le monde.

2. Éduquer les masses dans les principes et la pratique de la bonne volonté. Le mot "bonne volonté" est actuellement d'un usage courant dans tous les partis et tous les groupes, nationaux et internationaux.

3. Synthétiser et coordonner en un tout agissant les hommes et les femmes de bonne volonté du monde, qui reconnaîtront dans ces principes leur propre idéal personnel et qui tâcheront de les appliquer aux événements courants, dans le monde ou la nation.

4. Créer des listes d'adresses en tous pays, indiquant les hommes et les femmes de bonne volonté, sur lesquels on peut compter pour défendre l'unité du monde, les justes relations humaines et qui essayeront, dans leur propre pays, de faire partager cette idée à d'autres, par le moyen de la presse, de conférences, ou à la radio. Éventuellement, ce groupe mondial devrait avoir son propre journal ou magazine, grâce auquel ce processus éducatif peut s'intensifier et révéler que la bonne volonté constitue un principe et une technique universels.

5. Établir dans chaque pays, puis dans chaque grande ville, un bureau central, où tous renseignements pourront s'obtenir sur les activités des femmes et des hommes de bonne volonté dans le monde entier, et aussi sur les organisations, groupes ou partis qui œuvrent également dans le même sens pour la compréhension internationale et les justes relations humaines. Ainsi se recruteront de nombreux collaborateurs prêts à se joindre à cet effort particulier pour le développement de l'unité mondiale.

6. Travailler, en qualité d'hommes et de femmes de bonne volonté, en liaison avec tous les groupes, dont le programme mondial tend à aplanir les divergences mondiales et les querelles nationales, et à mettre fin aux distinctions raciales. Après vérification que de tels groupes agissent dans un sens constructif et ne se livrent pas à des attaques grossières ou a des agissements agressifs, qu'ils s'inspirent de la bonne volonté envers tous les hommes et sont dépourvus de tout nationalisme et d'esprit de parti agressifs, alors on peut offrir et [194] accorder librement la collaboration des gens de bonne volonté.

Nul grand effort d'imagination n'est nécessaire pour voir que, si ce travail de propager la bonne volonté et d'éduquer l'opinion publique avec sa puissance se poursuit et si les gens de bonne volonté sont découverts en tous pays et organisés, en cinq ans même, cela permettrait d'accomplir beaucoup de bien. Des milliers peuvent être ralliés dans les rangs des gens de bonne volonté. C'est la tâche primordiale. La puissance d'un groupe pareil, appuyé sur l'opinion publique, sera formidable. Il peut atteindre des résultats phénoménaux.

Le mode d'user du poids de cette bonne volonté et la méthode pour employer la volonté d'établir de justes relations humaines se développeront graduellement, selon le travail accompli et pour répondre aux besoins de la situation mondiale. Un usage discipliné du pouvoir en faveur de la bonne volonté et des justes relations humaines s'avérera possible et le déplorable état de choses actuel changera dans le monde. Cela s'accomplira, non par les habituelles méthodes guerrières du passé ou par l'imposition de la volonté d'un quelconque groupe agressif ou riche, mais par le poids d'une opinion publique informée, opinion basée sur la bonne volonté, sur une compréhension intelligente des besoins de l'humanité et sur la détermination de réaliser les justes relations humaines, enfin sur l'admission que les problèmes posés aujourd'hui à l'humanité peuvent se résoudre par la bonne volonté.

FIN DU LIVRE.