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LIVRE II LES DEGRES CONDUISANT A L’UNION - Partie 1

LIVRE II

LES DEGRES CONDUISANT A L'UNION

a. Les cinq obstacles et leur suppression

b. Définition des huit pratiques

Thème : Les moyens de réalisation [119]

1. Le yoga de l'action, conduisant à l'union avec l'âme, est aspiration ardente, lecture spirituelle et dévotion à Ishvara.

Nous devons ici fixer notre esprit sur le fait que nous abordons le livre où se trouve esquissée la partie du travail donnant les règles que l'aspirant doit suivre s'il espère réussir dans son entreprise, et indiquant les méthodes qui le conduiront à la réalisation de la conscience spirituelle. Le livre I traitait de l'objectif à atteindre. En achevant ce livre I, l'aspirant dit tout naturellement : "Que tout cela est souhaitable et juste ! Mais comment y parvenir ? Par où dois- je commencer ?"

Patanjali prend son point de départ tout au début et indique dans ce second livre quels sont :

1. Les conditions de base exigées de la personnalité.

2. Les obstacles qui peuvent alors être notés par le disciple sérieux.

3. Les huit "moyens de yoga" ou les huit sortes d'activité qui amèneront les résultats voulus. [120]

La simplicité même de cette esquisse en fait la très grande valeur ; elle ne comporte ni confusion, ni dissertations compliquées, mais se borne à un clair et simple exposé des conditions requises.

Il peut être utile ici de donner un aperçu des divers "yogas", pour permettre à l'étudiant de se former une claire conception de ce qui les distingue, en exerçant ainsi son sens de la discrimination.

Les principaux yogas sont au nombre de trois, les divers autres "yogas" – ou nommément tels – se situant dans l'un de ces trois groupes :

1. Le Raja Yoga : le yoga du mental ou volonté.

2. Le Bhakti Yoga : le yoga du cœur ou dévotionnel.

3. Le Karma Yoga : le yoga de l'action.

Le Raja Yoga se suffit à lui-même ; il est la science royale parmi tous les autres, la somme de tous les autres ; il est un point culminant qui complète, au sein du règne humain, le travail de développement. Il est la science du mental et de la volonté qu'un dessein anime ; il place sous la domination du Souverain Intérieur la plus haute des gaines de l'homme dans les trois mondes. Cette science coordonne l'homme inférieur triple tout entier, lui imposant une situation où il n'est plus qu'un véhicule pour l'âme ou Dieu intérieur. Il englobe les autres yogas et tire avantage de leurs réalisations. Il synthétise le travail de l'évolution et donne à l'homme la couronne royale.

Le Bhakti Yoga est le yoga du cœur ; par lui, tous les sentiments, [121] désirs et émotions sont subordonnés à l'unique bien-aimé, vu et connu dans le cœur. Il est la sublimation de tout ce qui est amour sur les plans inférieurs. Tous les désirs, toutes les ardeurs sont asservis, en faveur d'une seule aspiration fervente : connaître le Dieu d'amour et l'amour de Dieu.

Ce fut la science "royale" de la précédente race-racine, ou race atlantéenne, tout comme la science du Raja Yoga est la science majeure de notre civilisation aryenne.

Le Bhakti Yoga faisait de son dévot un arhat, le conduisant jusqu'à la quatrième initiation. Le Raja Yoga en fait un adepte et le conduit jusqu'au portail de la cinquième initiation. Tous deux mènent à la libération, car si l'arhat est affranchi du cycle des renaissances, le Raja Yoga lui procure la libération en vue d'un service parachevé et la liberté de travailler en tant que Magicien blanc. Le Bhakti Yoga est le yoga du cœur et du corps astral.

Le Karma Yoga est en relation particulière avec l'activité du plan physique et avec la mise en œuvre d'une manifestation objective de toutes les impulsions intérieures. Dans sa forme ancienne la plus simple, il fut le yoga de la troisième race-racine, dite lémurienne, et ses deux expressions les plus connues sont :

a. Le Hatha Yoga.

b. Le Laya Yoga.

Le premier a trait particulièrement au corps physique, à son fonctionnement conscient (à l'exclusion de la subconscience ou de l'automatisme) et aux diverses pratiques donnant à l'homme la maîtrise des différents organes et de l'ensemble du mécanisme caractérisant le corps physique. Le second concerne [122] le corps éthérique, les centres de force ou chakras qui s'y trouvent, ainsi que la distribution des courants de force et l'éveil du serpent de feu.

On peut attirer l'attention sur le point suivant : si l'on divise le torse humain en trois sections, il peut être établi que :

1. Le Karma Yoga avait pour résultat l'éveil des quatre centres situés au- dessous du diaphragme.

2. Le Bhakti Yoga provoquait leur transmutation et transfert dans les deux centres situés au-dessous du diaphragme mais encore dans le torse, c'est-à-dire le cœur et la gorge.

3. Le Raja Yoga synthétise toutes les forces du corps dans la tête et, de là, les distribue et les contrôle.

Le Raja Yoga, dont Patanjali fait son thème dominant, englobe les effets de tous les autres yogas. Il n'est possible qu'après la mise en pratique des autres ; ce qui ne signifie pas que ce dernier travail doit être accompli au cours de cette vie-ci. L'évolution a conduit tous les fils des hommes (prêts à être des chelas ou disciples) à travers les races diverses  au temps de la race lémurienne (ou même pendant la chaîne précédente ou plus grand cycle), ils furent tous des hatha ou laya yogis. Il en résulte le développement et la maîtrise du corps physique en sa double nature, dense et éthérique.

La race atlantéenne vit se développer le corps du désir ou corps astral ; l'élite de cette race se composait de vrais fils du bhakti yoga et de véritables dévots. Actuellement, le plus élevé des trois corps doit être amené à parachever son développement ; c'est là le rôle du Raja Yoga et l'objectif visé par [123] l'œuvre de Patanjali. La race aryenne apportera à l'économie générale la contribution de ce parfait développement et la famille humaine tout entière (à l'exception d'un pourcentage d'êtres pour qui l'entrée dans la race fut trop tardive pour permettre le plein épanouissement de l'âme) se révélera composée de Fils de Dieu, possédant tous les pouvoirs divins, épanouis et consciemment employés sur le plan physique et dans le corps physique. Trois choses, dit Patanjali, provoqueront ce résultat, jointes à la pratique de certaines méthodes et règles, qui sont :

1. Une aspiration ardente et l'empire sur l'homme physique, afin que chaque atome de son corps soit enflammé de zèle et voué à l'effort.

2. La lecture spirituelle, qui se rapporte à la capacité du corps mental de percevoir ce qu'il y a derrière un symbole ou de prendre contact avec le sujet qui gît derrière l'objet.

3. La dévotion à Ishvara, concernant le corps astral ou émotif, le cœur entier se répandant en amour pour Dieu – Dieu dans le cœur même de l'être, Dieu dans le cœur de son frère et Dieu tel qu'Il Se voit en toutes formes.

L'aspiration ardente est la sublimation du karma yoga ; la dévotion à Ishvara est la sublimation du bhakti yoga, tandis que la lecture spirituelle est le premier pas menant au Raja Yoga.

La "dévotion à Ishvara" est une expression dont le sens, large et général, comprend à la fois le rapport du soi personnel avec le soi supérieur – le principe d'Ishvara ou principe christique dans le cœur – et le rapport de l'Ishvara individuel avec l'Ishvara universel ou cosmique ; cette expression se rapporte à la prise de conscience, par l'âme qui est en l'homme, [124] du fait qu'elle est partie intégrante de l'âme suprême ; il en découle la conscience de groupe, et c'est là l'objectif de la science royale.

La dévotion implique certains facteurs dont il sera appréciable, pour le dévot, de prendre connaissance :

1. L'aptitude à se décentraliser, à échanger une attitude d'égocentrisme et d'égoïsme contre une attitude consistant à sortir de soi-même pour aller au-devant de l'être aimé. La perte de toutes choses compte pour rien, pourvu que soit atteint l'objet de la dévotion.

2. L'obéissance à l'objet aimé sitôt que cet objet est connu ; ce qui, dans certaines traductions, a été nommé la "complète obéissance au Maître", cette interprétation étant juste et fidèle. Cependant, par le fait que le mot Maître signifie (pour l'étudiant en occultisme) l'un des adeptes, nous avons préféré traduire ce mot par "Ishvara", le Dieu unique dans le cœur de l'homme, le divin Jiva ou "Point de la Vie divine" au centre de l'être de l'homme. Il est le même en tous les hommes, chez le sauvage comme chez l'adepte ; la différence ne réside que dans le degré de manifestation ou de maîtrise. La vraie science du yoga ne préconise jamais l'obéissance complète à quelque gourou ou mahatma, dans le sens d'une sujétion totale de la volonté. L'enseignement qu'elle donne est la soumission de l'homme inférieur à la volonté du Dieu intérieur. Toutes les méthodes de yogas ont en vue cette fin particulière. Il est nécessaire de garder ce fait bien présent à l'esprit. La "lecture spirituelle" est, dans ce sens, le préliminaire le plus occulte et significatif.

Toute forme est le résultat de la pensée et du son. Toute forme voile ou dissimule une idée ou un concept. Toute forme, en conséquence, n'est que le symbole, ou tentative de représentation, [125] d'une idée ; cela est vrai, sans exception, sur tous les plans de notre système solaire, partout où se trouvent des formes, qu'elles soient créées par Dieu, homme ou déva.

Un des objectifs de l'entraînement du disciple consiste à le mettre à même de constater ce qui gît à l'arrière-plan de toute forme dans l'un quelconque des règnes de la nature et d'être, de ce fait, informé du caractère de l'énergie spirituelle qui a donné naissance à cette forme. L'amplitude de ce symbolisme cosmique deviendra apparent même au plus superficiel des penseurs, et le débutant sur le sentier suivi par le chéla doit apprendre à classer les formes multiples en groupements déterminés représentant certaines idées de base. Il doit interpréter les idées qui gisent derrière les symboles particuliers et chercher l'impulsion distincte latente en toute forme. Il peut en commencer la pratique dans son entourage et à la place où il se trouve. Il peut chercher à déceler l'idée que voile la forme de son frère : il peut rechercher Dieu à l'arrière-plan du corps de tout homme quel qu'il soit.

Le sutra qui fait l'objet de cette étude mène ainsi l'aspirant sur le plan le plus pratique de la vie ; il le met en face de trois questions fondamentales qui l'amèneront inévitablement, tandis qu'il en cherche la réponse correcte, à s'équiper en vue de fouler le sentier. Ces trois questions sont :

1. Vers quel objectif tendent tous les désirs et aspirations de mon âme ? Vers Dieu ou vers les choses matérielles ?

2. Ma nature inférieure tout entière est-elle placée par moi sous la domination d'Ishvara ou homme spirituel véritable ?

3. Au cours de mes contacts quotidiens, Dieu est-Il vu par moi à l'arrière- plan de toute forme et de toute circonstance ? [126]

2. Le but de ces trois questions est de provoquer la vision de l'âme et d'éliminer les obstructions.

Il est intéressant de noter ici que les mots "vision de l'âme" précèdent l'idée d'élimination des obstacles ou obstructions, montrant par là que la vision est possible pour ceux mêmes qui ne sont pas encore perfectionnés. La vision vient en ces moments d'exaltation et de haute aspiration dont sont susceptibles la plupart des fils des hommes, et cette vision produit le stimulant voulu pour susciter en eux la détermination et la persévérance qu'exige l'élimination de l'obstruction. Les mots "élimination des obstructions" ou "modification des obstacles" (selon certaines traductions) est une expression large et générique ; les commentaires hindous font remarquer que cette idée va jusqu'à englober l'extirpation des semences de ces obstacles et leur destruction totale, comme par le feu. Ainsi qu'une graine consumée et desséchée est désormais incapable de se propager, devient stérile et ne germe plus, de même les graines des obstructions à la vie de l'esprit deviennent-elles aussi stériles. Ces graines se classent en trois groupes produisant chacun une ample moisson d'obstacles ou d'obstructions sur les trois plans de l'évolution humaine : les graines latentes dans le corps physique, celles qui provoquent les obstructions du corps astral, et les graines latentes dans le corps mental. Elles sont dans chaque cas de trois sortes, formant exactement neuf types ou espèces de graines :

1. Les graines rapportées de vies antérieures.

2. Les graines semées en cette vie. [127]

3. Les graines introduites dans le champ de la vie d'un être par la race ou la famille auxquelles il est apparenté.

Ce sont ces graines qui provoquent les obstructions ou obstacles à la vision de l'âme et au libre jeu de l'énergie spirituelle. Après avoir dit qu'il y a cinq sortes de graines, Patanjali poursuit en les analysant selon leur espèce. Chez quelques commentateurs, le mot est traduit par "distractions" ; les trois termes sont également corrects et chacun d'eux peut être employé. Il faut peut-être noter que :

1. Le terme "obstruction" est plus techniquement correct quand il s'applique au plan physique.

2. Le terme "obstacle" est plus clairement approprié quand il s'applique aux choses qui, par le truchement du corps astral, empêchent la vision de l'âme.

3. Le mot "distraction" se rapporte plus spécialement aux difficultés qui assaillent l'homme lorsqu'il cherche à pacifier le mental et à réaliser par là la vision de l'âme.

3. Voici les obstacles producteurs de difficultés : avidya (l'ignorance) et le sens du désir de la personnalité, la haine et le sens de l'attachement.

 Ce sont les cinq idées ou concepts erronés qui, pendant des âges sans nombre et à travers maintes et maintes vies, empêchent les fils des hommes de prendre conscience de leur filiation divine. Ce sont ces concepts qui incitent les hommes à s'identifier avec ce qui est inférieur et matériel et à oublier les réalités divines. Ce sont ces idées fausses qui font, de la [128] Monade divine, un enfant prodigue et l'exilent en lointain pays pour le nourrir des caroubes de l'existence mortelle. C'est cela qui doit être surmonté et éliminé avant qu'un homme puisse "lever les yeux" et contempler à nouveau le Père et la Maison du Père, étant ainsi à même de fouler consciemment le Sentier du retour.

On peut noter que deux des obstacles : avidya et le sens de la personnalité, se rapportent à l'homme en tant que synthèse sur le plan physique ; que le désir concerne son corps astral, véhicule de la sensibilité, et que la haine et le sens de l'attachement sont les produits du sens de l'égoïsme (principe de l'ahamkara) qui anime le corps mental. Ainsi, la triple personnalité est le champ d'ensemencement et les graines se propagent dans le sol de la vie personnelle au sein des trois mondes ; elles y croissent et prospèrent en obstruant l'homme réel et lui faisant obstacle. Ces graines doivent être détruites et, de leur destruction, trois choses résultent :

1. Le karma est épuisé.

2. La libération est réalisée.

3. La vision de l'âme est parachevée.

4. Avidya (l'ignorance) est la cause de toutes les autres obstructions, qu'elles soient latentes, en voie d'élimination, surmontées, ou pleinement opérantes.

La vaste portée de ce sutra est ce qui attire tout d'abord l'attention. Il nous conduit en pensée jusqu'à la cause originelle de tout mal et, dans sa mention des obstructions, il fait [129] le tour de toutes les conditions possibles de leur présence. Cette stance résume la situation de tout homme, dès le stade de l'état sauvage, puis, à travers toutes les conditions intermédiaires, jusqu'à l'état de l'arhat où sont brisés les derniers liens de l'ignorance ; elle établit qu'il faut chercher la raison de l'existence du bien et du mal, ainsi que la raison de la présence évidente de l'égoïsme et des désirs personnels de toutes sortes, dans la grande condition de base que constitue la limitation inhérente à la forme elle- même : avidya ou l'ignorance.

Dès le début de ses investigations dans les lois du développement spirituel, il est rappelé à l'aspirant que deux facteurs, basés sur le fait de la manifestation elle-même, doivent être pris en considération :

1. Le fait du non-soi vers lequel sont attirés les points divins de la vie spirituelle, et qui se les incorpore au cours de la période d'évolution.

2. Le fait des limitations consécutives au revêtement d'une forme.

Les deux facteurs ci-dessus doivent être reconnus comme vrais, qu'il s'agisse du Logos solaire, du Logos planétaire, d'un homme ou d'un atome. Toute forme de vie divine (l'infiniment petite comme l'infiniment grande) voile ou dissimule une portion d'énergie spirituelle. Il en résulte nécessairement, pour le point de l'existence spirituelle, une réclusion, une exclusion, un encerclement de soi, et seuls les contacts de l'existence elle-même et la lutte de l'unité spirituelle dans la forme peuvent en définitive amener la libération.

En attendant, et pendant tout le processus d'incarnation, le point voilé de la vie demeure dans l'ignorance de ce qui se trouve hors de lui-même, et doit soutenir une lutte progressive pour se frayer une voie de sortie vers une indépendance et une liberté sans cesse accrues. [130]

La sphère de sa propre forme est, de prime abord, la seule chose dont il ait conscience et il reste dans l'ignorance de tout ce qui est en dehors de lui. Les contacts provoqués par le désir sont les facteurs grâce auxquels l'ignorance se mue en connaissance, et l'homme (car nous ne considérons en l'occurrence que l'unité humaine, bien que la loi de base soit valable pour toutes les formes de la vie divine) devient alors progressivement conscient de lui-même tel qu'il est et prend également conscience de son entourage. Cet entourage étant triple (physique, astral et mental) et l'homme ayant ainsi trois véhicules pour lui permettre d'établir un contact dans les trois mondes, cet éveil s'accomplit au cours d'une très longue période. L'ancien commentaire dit à ce propos :

"Dans la Salle de l'Ignorance les triples gaines sont connues. La vie solaire à son point le plus dense est contactée et l'homme émerge pleinement humain."

Puis, l'homme prend conscience d'autre chose, du groupe auquel il appartient ; il le fait en découvrant que sa propre réalité inférieure est latente en sa personnalité. Il apprend que lui, l'atome humain, fait partie d'un groupe, ou centre, dans le corps d'un Homme céleste, un Logos planétaire, et qu'il doit prendre conscience :

a. De la vibration de son groupe.

b. Du dessein de son groupe.

c. Du centre de son groupe.

 C'est le stade allant du sentier de probation ou du Sentier de l'état de Disciple, jusqu'à la troisième initiation. Et l'ancien commentaire poursuit :

"Dans la Salle de l'Enseignement il est pris contact avec le mystère central. La méthode de libération est vue, la loi est correctement accomplie, et l'homme émerge, sur le point d'être adepte." [131]

Finalement, l'homme pénètre dans la Salle de la Sagesse, où il était admis occasionnellement (et de plus en plus fréquemment) après avoir passé par la première grande initiation, et il s'instruit de la place qu'occupe son groupe dans le plan planétaire, en jetant aussi un regard sur l'ordre cosmique. L'ignorance (au sens que nous donnons à ce terme) est bien-entendu supprimée, mais on ne peut assez répéter avec insistance qu'il reste encore beaucoup d'inconnu, même pour l'adepte, et que le Christ Lui-même, le grand Instructeur du Monde, ne sait pas tout ce que contient la conscience du Roi du Monde. Quoi qu'il en soit, les Yoga Sutras de Patanjali se bornent à traiter de la victoire sur l'ignorance, qui garde l'homme soumis à la roue de la renaissance et l'empêche de développer les véritables pouvoirs de son âme. L'ancien commentaire dit ceci au sujet de ce stade final :

"Dans la Salle de la Sagesse, la lumière brille pleinement sur les voies de l'adepte. Il en connaît et voit la septième partie et il a une vision de tout le reste. Il est lui-même septuple et, de cette Salle, il émerge Dieu."

5. Avidya est l'état où se confondent le permanent, le pur, le béni et le soi avec ce qui est impermanent, impur, douloureux et le non-soi.

Cet état d'ignorance, ou état d' "avidya", caractérise tous ceux qui ne font pas encore de distinction entre le réel et l'irréel, entre la mort et l'immortalité et entre la lumière et l'obscurité ; en conséquence, il régit la vie dans les trois mondes, [132] car la correspondance de l'avidya sur le plan physique où l'homme en incarnation l'expérimente, existe sur tous les plans. C'est une limitation de l'Esprit lui-même et l'inévitable corollaire de la manifestation en une forme. L'unité spirituelle est née aveugle et privée de sens. Au début des âges et des cycles de renaissance, elle prend forme en un état de complète inconscience. Il lui faut s'instruire de ce qui l'entoure et elle doit, pour ce faire, commencer par développer les sens qui lui rendront possibles le contact et la connaissance. La méthode et le processus qui permettent à l'homme de développer en lui cinq sens, ou voies d'accès au non-soi, sont bien connus, et tous les manuels classiques traitant de la physiologie peuvent fournir à ce sujet l'information voulue. Trois facteurs relatifs à l'unité spirituelle doivent être présents à l'esprit :

1. Les sens doivent être développés.

2. Leur récognition doit s'ensuivre, ainsi que leur utilisation.

3. Au cours d'une période ultérieure, l'homme spirituel emploie les sens à la réalisation de son désir, et ce faisant, s'identifie à son dispositif de manifestation.

Il est doublement aveugle, car il est non seulement né aveugle et privé de sens, mais encore mentalement aveuglé ; il ne se voit pas tel qu'il est, ne voit pas les choses telles qu'elles sont, mais commet l'erreur – et cela pendant de nombreux cycles – de se regarder comme étant lui-même sa forme matérielle. Il n'a pas le sens des valeurs et des proportions, mais considère l'homme inférieur transitoire, souffrant, impur et matériel (la totalité de ses trois enveloppes) comme étant lui-même la réalité. Il ne peut se dissocier de ses formes. Les sens font partie des formes ; ils ne sont pas [133] l'homme spirituel, l'habitant de la forme ; ils participent du non-soi et l'homme prend contact, par leur entremise, avec le non-soi planétaire.

Par la discrimination et l'absence de passion, le soi qui est, lui, permanent, pur et bienheureux peut en définitive se dissocier du non-soi impermanent, impur et douloureux. L'homme qui n'a pas réalisé cette condition est en état d'avidya : quand elle est en voie de réalisation, il suit le quadruple sentier de vidya, ou de la connaissance, et quand l'âme est connue telle qu'elle est et que le non-soi est relégué à sa juste place d'enveloppe, de véhicule et de moyen d'action, la connaissance elle-même est alors transcendée et seul demeure celui qui connaît. C'est la libération et l'arrivée au but.

6. Le sens de la personnalité est imputable à l'identification de celui qui connaît avec les instruments de la connaissance.

Cette stance est un commentaire de la précédente. L'étudiant doit se souvenir que celui qui connaît, l'homme spirituel, possède des instruments divers lui permettant d'établir des contacts avec son entourage et d'acquérir ainsi une connaissance de plus en plus complète. Ce sont :

1. Ses trois enveloppes ou corps, qui constituent pour lui un moyen de contact sur les trois plans :

a. Le corps physique.

b. Le corps émotionnel ou astral.

c. Le corps mental.

2. Sur le plan physique, ses cinq sens : ouïe, toucher, vue, goût et odorat. [134]

3. Le mental, le grandiose sixième sens, dont l'utilisation est triple.

Jusqu'à présent, la majorité des hommes ne l'emploient qu'à un seul usage.

Sa première utilisation, la plus courante, consiste à grouper l'ensemble des contacts établis et à les transmettre, sous forme d'information, à celui qui connaît, ou égo, d'une façon très analogue à celle qu'emploie le système nerveux pour télégraphier au cerveau les contacts extérieurs qu'il établit. Le premier effet produit par cette utilisation du mental est le sens de la personnalité, lequel commence à diminuer lorsque les autres utilisations deviennent possibles.

Une deuxième utilisation du mental est celle que mettent en jeu les cinq premiers moyens de yoga : la faculté de transmettre au cerveau les pensées, les vœux et la volonté de l'égo ou âme, ce qui provoque, au sein du soi personnel sur le plan physique, une récognition de la réalité. Le sens de l'identification avec le non-soi s'amoindrit alors régulièrement.

La troisième utilisation du mental est son emploi par l'âme en tant qu'organe de vision permettant de connaître le domaine de l'âme elle-même et d'entrer en contact avec lui. Les trois derniers moyens de yoga aboutissent à ce résultat.

Il faut insister sur l'importance qu'il y a à noter ce fait. Si l'aspirant veut bien considérer le développement et le plein usage du sixième sens comme étant son but immédiat et garder présents à l'esprit les trois objectifs à la réalisation desquels il est destiné, il fera de rapides progrès ; son sens de la personnalité s'évanouira et l'identification avec l'âme s'ensuivra. Il s'agit là d'une des plus grandes entraves qui retiennent captifs les fils des hommes et c'est là que la hache doit frapper l'arbre à sa racine. [135]

7. Le désir est l'attachement aux objets de plaisir.

Cette traduction n'est aucunement littérale, mais elle restitue si clairement l'idée fondamentale, qu'il vaut mieux traduire ce sutra comme il l'est ci-dessus.

Ces objets de plaisir comprennent tout attachement que peut contracter un homme, depuis l'état sauvage de l'humanité en son enfance, jusqu'aux degrés avancés de l'état de disciple ; ils englobent le désir pour les objets grossiers du plan physique, autant que l'attachement aux choses, occupations et réactions que provoquent les émotions ou les recherches intellectuelles ; ils couvrent toute la gamme ou portée de l'expérience sensible, depuis la réaction du sauvage à la chaleur ou un bon repas, jusqu'à l'extase du mystique. Le désir est un terme générique caractérisant la tendance qu'a l'esprit à s'extérioriser pour se porter vers la vie de la forme. Il peut s'appliquer au plaisir du cannibale se délectant de sa nourriture, à l'amour d'un homme pour sa famille, à l'intérêt appréciateur de l'artiste devant un beau tableau, comme à l'adoration du dévot pour le Christ ou pour son gourou. Il s'agit d'un attachement à quelque niveau qu'il soit, et il semble que le progrès de l'âme consiste en cette expérience par laquelle l'être, passant d'un objet sensoriel à un autre, se trouve seul, rejeté à lui-même. Tous les objets d'attachement sont épuisés et son gourou lui-même semble l'avoir délaissé. Il ne lui reste qu'une seule réalité, la réalité spirituelle qui est lui-même. Son désir se tourne vers l'intérieur. Il ne s'élance plus vers l'extérieur, mais trouve au-dedans de lui le Royaume de Dieu. Tout désir le quitte alors. Il établit des contacts et continue à se manifester [136] et à œuvrer sur les plans de l'illusion, mais il travaille à partir du centre, habitat de son soi divin, somme de tout désir, et rien ne subsiste plus de ce qui pourrait l'entraîner sur les chemins détournés du plaisir et de la peine.

8. La haine est l'aversion pour quelque objet des sens.

Ce sutra est l'inverse du précédent. Le vrai yogi ne ressent ni aversion ni désir ; il a établi son équilibre entre ces couples de contraires. La haine cause la séparation, tandis que l'amour révèle l'unité sous-jacente de toutes les formes. La haine est le résultat de la concentration sur la forme et de l'oubli de ce que chaque forme révèle à un plus ou moins haut degré. La haine est un sentiment de répulsion et incite l'homme à se détourner de l'objet haï. La haine est l'opposé de la fraternité et constitue en conséquence la violation d'une des lois fondamentales du système solaire. La haine est la négation de l'unité ; elle dresse des barrières et produit les causes qui mènent à la cristallisation, à la destruction et à la mort. Elle est l'énergie utilisée à répudier au lieu de synthétiser, allant ainsi à l'encontre de la loi de l'évolution.

La haine est en fait le résultat de l'ignorance et du sens de la personnalité joints au désir mal employé, et elle constitue presque le point culminant de ce triple ensemble. Ce furent le sens de la personnalité et une extrême ignorance, accompagnés d'un désir de gain personnel, qui suscitèrent dans le cœur de Caïn sa haine à l'égard d'Abel, et furent la cause du premier meurtre, ou destruction de la forme d'un frère. Tout ceci doit être attentivement considéré, car tout cœur humain [137] contient un certain degré de haine et une certaine mesure d'aversion ; ce n'est cependant que lorsqu'elle sera entièrement surmontée par l'amour, ou sens de l'unité, que la mort, le danger et la peur disparaîtront aux yeux de la famille humaine.

9. Un intense désir pour l'existence sensible constitue l'attachement. Il est inhérent à toute forme ; il se perpétue et il est connu même des très sages.

Cette forme d'attachement est la cause fondamentale de toute manifestation. Elle est inhérente aux rapports entre les deux grands contraires : L'esprit et la matière ; elle est le facteur déterminant de la manifestation logoïque et c'est la raison pour laquelle "les très sages" eux-mêmes y sont soumis. Cette forme d'attachement est une faculté de reproduction et perpétuation automatiques de soi, et il ne faut pas oublier que la maîtrise de cette tendance, même portée à son plus haut point par l'adepte, n'est jamais que relative. Tant que le logos de notre système solaire, ou Esprit Absolu, s'incarnera à travers un système solaire, cette tendance sera présente au sein de l'Esprit planétaire suprême et de l'existence spirituelle la plus élevée. Tout ce qu'il est possible de faire pour dominer l'attachement ou extirper le désir, consiste à développer en soi le pouvoir d'équilibrer entre eux les couples de contraires sur un plan particulier quel qu'il soit ; on est alors dégagé de l'emprise des formes de ce plan et le retrait devient possible. L'étudiant ordinaire donne aux mots attachement et désir, ainsi qu'à leur destruction, un sens très secondaire ; il les interprète [138] en fonction de ses progrès insignifiants. Ce ne sont là que des mots, cherchant très imparfaitement et d'une façon uniquement symbolique, à désigner un travail occulte. Ils ne peuvent être réellement compris qu'en relation avec la loi d'Attraction et de Répulsion et par la compréhension du système des vibrations occultes.

La volonté de vivre ou de se manifester fait partie de l'impulsion de la Vie divine ; elle est donc légitime. La volonté d'être ou de se manifester sur un plan donné quel qu'il soit ou au moyen de quelque groupement particulier de formes, ne se justifie pas si cette sphère de manifestation est dépassée. Lorsque l'un quelconque de ces groupes particuliers de formes a servi son dessein consistant à fournir des moyens de contacts expérimentaux, et n'a plus d'autre enseignement à donner, le mal entre en jeu, car le penchant au mal n'est qu'une tendance au retour à l'emploi de formes et de pratiques que l'habitant intérieur a dépassées. C'est pour cette raison que les péchés de nature grossièrement animale sont universellement considérés comme étant le mal, car il est généralement reconnu que l'habitant de la forme humaine a dépassé le stade du troisième règne, ou règne animal.

L'adepte, en conséquence, a transcendé l'attachement aux formes sur trois plans (physique, astral et mental) et détruit toute convoitise à l'égard des formes de ces plans. Quand la vie de l'Esprit se retire, la forme meurt, occultement parlant. Quand la pensée de l'égo ou soi supérieur s'attache à son propre plan, aucune énergie ne se porte à l'extérieur vers la matière des trois mondes et il ne peut donc y avoir aucune possibilité de construction de forme ou d'attachement à la forme. Ceci s'accorde avec le truisme occulte "l'énergie suit la pensée", ainsi qu'avec l'enseignement selon lequel le corps [139] du principe Christique (le véhicule bouddhique) ne commence à se coordonner qu'au moment de la disparition des impulsions inférieures. Cela peut également s'appliquer au fait que le véhicule causal croît plus vite en beauté, en amplitude et en activité au cours des stades de l'état de disciple qu'il ne le pouvait auparavant pendant le cycle entier des incarnations précédentes. L'énergie égoïque n'est pas, à strictement parler, orientée vers l'extérieur, elle est plus exactement dirigée vers le propre développement du soi. L'attachement à la forme ou l'attraction que celle-ci exerce sur l'Esprit, constitue la grande impulsion involutive. La répudiation de la forme et sa désintégration consécutive sont le grand stimulant évolutif.

10. Lorsque ces cinq obstacles sont subtilement connus, ils peuvent être surmontés par une attitude mentale opposée.

L'expression "subtilement connus" pourrait être paraphrasée par les mots : "Quand l'homme intérieur en a pris conscience", et l'idée qu'il faut trouver derrière ces termes est fort bien expliquée comme suit par Dvidedi dans son Commentaire :

"Ayant décrit la nature des "distractions", l'auteur indique la manière de les supprimer. Elles se divisent en deux sortes : subtile et grossière ; la première comprend celles qui existent en une condition latente sous forme d'impressions, tandis que la seconde se compose de celles qui affectent le mental de façon concrète. La première ne peut être complètement supprimée que par l'obtention de la maîtrise sur la totalité du principe sur lequel elles reposent, à savoir le principe pensant." [140]

C'est là le premier travail de l'aspirant au yoga. Il doit se rendre compte de la nature des obstacles et se mettre à les surmonter, en accomplissant ce travail depuis le plan mental. Il doit acquérir la maîtrise du dispositif de la pensée, puis apprendre comment utiliser ce dispositif. Lorsque ce travail est accompli, il commence à éliminer les obstacles au moyen de courants contraires. Les obstacles eux-mêmes sont le résultat d'habitudes de pensées défectueuses et d'un mauvais usage du principe pensant. Quand ils sont subtilement connus en tant que graines engendrant les "formes productrices d'obstacles", ils peuvent alors être exterminés à leurs stades latents par des habitudes de pensées correctes, qui auront pour résultat la mise en œuvre de moyens apportant la liberté.

L'ignorance (avidya) doit être supplantée par la véritable vidya ou connaissance, et chacun sait que les quatre vidyas et les quatre nobles vérités, jointes aux quatre éléments fondamentaux, constituent, en cette quatrième race de ce quatrième globe de la quatrième ronde, la somme de cette connaissance.

Les quatre vidyas de la philosophie hindoue peuvent s'énumérer comme suit :

1. Yajna Vidya. La célébration de rites religieux en vue d'obtenir certains résultats. Le cérémonial magique. Elle a affaire au son, donc à l'akasha ou éther de l'espace. La "Yajna" est la déité invisible dont l'espace est imprégné.

2. Mahavidya. La grande connaissance magique. Elle a dégénéré en culte tantrique. Elle traite de l'aspect féminin ou [141] matière (mère). Elle est la base de la magie noire. Le véritable Mahayoga concerne la forme (le second aspect) et l'adaptation de celle-ci à l'Esprit et à ses exigences.

3. Guhya vidya. La Science des mantras. La connaissance secrète des mantras mystiques. Le pouvoir occulte du son, du Mot.

4. Atma vidya. La véritable sagesse spirituelle.

Les quatre nobles vérités ont été établies pour nous par la parole du Bouddha en ces termes :

"Voici, le Béni s'adressa à ses frères et leur dit :

"Par notre absence de compréhension, par notre manque de pénétration des Quatre Vérités aryennes, frères, nous avons, vous et moi, couru de-ci de-là en une ronde errante, au cours de ce long, long voyage (de la renaissance). Et quelles sont- elles, ces Quatre Vérités ?

La Vérité aryenne du Mal ; la Vérité aryenne de l'Extirpation du Mal ; la Vérité aryenne de la Cessation du Mal ; la Vérité aryenne de la Voie conduisant à la Cessation du Mal.

Mais, frères, quand les Quatre Vérités aryennes sont comprises et pénétrées, l'ardent désir pour l'existence est alors extirpé, et coupé le fil qui conduit à la renaissance ; il n'est alors plus de retour à l'existence."

Ainsi parla le Béni. Quand le Bienheureux eut ainsi parlé, le Maître ajouta ceci :

"Aveugles devant la Quadruple Vérité aryenne des Choses, Aveugles et ne voyant pas les choses dans leur réalité,

Long fut notre voyage à travers maintes naissances. Quand elles sont vues, le cordon de la vie n'est plus. La racine du Mal coupée, il n'est plus de devenir."

Les quatre éléments ont été définis pour nous dans le texte suivant de la Doctrine Secrète (I. 95) :

"L'œuf doré était entouré de sept Éléments naturels, quatre présents (l'éther, le feu, l'air, l'eau), trois secrets." [142]

11. Leurs activités doivent être éliminées par le processus de la méditation.

L' "attitude mentale opposée" dont il est question dans le précédent sutra, se rapporte nettement aux graines ou tendances latentes qui subsistent dans le corps mental et le corps de désir. Cette attitude mentale doit devenir attitude d'active méditation mentale et de pensée concentrée sur un seul objectif, si l'on veut que les activités du corps physique soient également maîtrisées. Ce que nous faisons est en grande partie automatique et résulte d'habitudes mentales et émotives de longue date. Instinctivement, en vertu d'anciennes pratiques et par notre asservissement à un monde de formes tangibles, nos activités du plan physique sont régies par les cinq obstacles. Ceux-ci doivent être supprimés, et le travail se rapportant aux graines latentes et à la suppression des activités externes doit se poursuivre simultanément ; pour les unes au moyen d'une opposition résolue de l'attitude mentale et, en ce qui concerne les autres, grâce à la méditation qui fait intervenir les trois facteurs : penseur, mental, et cerveau physique. Il ne faut pas oublier ce fait, sinon la théorie ne serait pas intelligemment appliquée sur le plan pratique. Ce processus de méditation étant exposé dans le Livre III, il n'est pas nécessaire de s'y étendre ici.

12. Le karma lui-même a sa racine dans ces cinq obstacles et doit porter ses fruits en cette vie ou en quelque vie ultérieure.

Aussi longtemps que l'homme sur le plan physique reste [143] vulnérable à l'égard de ces obstacles ou leur est asservi, il continuera à se livrer à des activités qui produiront d'inévitables effets, et il restera tout aussi longtemps attaché à la roue de la renaissance, condamné à revêtir une forme. L'étudiant devrait noter avec soin que ces cinq obstacles constituent la cause de toutes les activités de la personnalité inférieure, ou homme inférieur. Tout ce qu'il fait se fonde sur l'un ou l'autre de ces obstacles et il n'est pas d'action accomplie par l'homme moyen dans les trois mondes, qui ne soit une conséquence de l'ignorance et de sa suite d'identifications et réactions erronées.

Quand les obstacles sont surmontés et qu'à l'ignorance, qui est leur champ commun, se substitue la sagesse divine, les effets à l'œuvre sur le plan physique se font de plus en plus rares et les chaînes qui retiennent l'homme sur la grande roue de la manifestation physique se rompent l'une après l'autre. Ces chaînes sont triples, tout comme est triple le champ de l'ignorance, car elles sont les trois grands plans de conscience qui constituent le champ de l'évolution humaine. Quand le champ de l'ignorance devient le champ de l'expérience consciente, quand les chaînes sont ressenties en tant qu'entraves et limitations, l'aspirant-chéla a fait un très grand pas en avant dans le processus de libération. Quand il peut porter la lutte à l'intérieur, dans ce que Ganganatha Jha appelle "la vie non manifestée" et que nous nommons souvent "les plans subtils", il pénètre dans la Salle de l'enseignement et brise les chaînes si subtilement forgées par Kama (ou désir) et par l'emploi erroné du mental. Plus tard, il entrera dans la salle de la Sagesse, où il lui sera enseigné certaines méthodes ésotériques et occultes, propres à hâter le processus de libération. [144]

13. Tant que les racines (ou samskaras) existent, leurs fruits seront la naissance, la vie, et les expériences d'ou résultent plaisir ou douleur.